Selon un rapport récemment publié par la Fondation Friedrich-Ebert (FES), l’insécurité fait partie des préoccupations d’un grand nombre de Maliens, outre le chômage des jeunes et la lutte contre la pauvreté.

 

Le jeudi 12 mars 2020, le bureau Mali de la Fondation Friedrich-Ebert (FES) a rendu public son rapport intitulé « Que pensent les Malien (ne) s ? ». Il s’agit d’une enquête d’opinion qui vise à recueillir les perceptions de la population sur les grandes questions d’intérêt nationales. Elle a été réalisée dans toutes les capitales régionales et le district de Bamako, entre le 12 et le 26 novembre 2019.

Au total, l’étude a concerné 2186 personnes âgées d’au moins 18 ans. Il ressort que les principaux défis pour les Maliens sont  l’insécurité, la lutte contre le chômage des jeunes et la lutte contre la pauvreté. La quasi-moitié de la population estime que ce sont les défis majeurs qu’il faut résoudre.

L’insécurité au cœur des préoccupations

Une grande majorité de Maliens (50,2%) est préoccupée par l’insécurité grandissante. Cette anxiété se fait sentir sur toute l’étendue du territoire national. A Gao, Tombouctou et Ménaka, plus de la moitié de la population estime que la situation sécuritaire s’est dégradée. Le Centre (Mopti), épicentre des conflits locaux, et le district de Bamako ne sont pas épargnées par cette insécurité galopante.

En ce qui concerne les actions des troupes étrangères sur le sol malien, respectivement 78% et 79%  des personnes interrogées se disent insatisfaits de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) et la force française de lutte contre le terrorisme au Sahel (Barkhane).

Par contre 92% des citoyens interrogés dans le cadre de l’étude font confiance aux forces de défense et sécurité dans la lutte contre l’insécurité. C’est seulement dans la région de Kidal, fief des groupes ex-indépendantistes que 66% des personnes sondées déclarent ne pas être satisfaits des forces de défense et de sécurité. Le principal reproche au niveau national fait à l’égard des FAMa est la corruption : 33% des citoyens estiment que l’armée est corrompue.

Nous pouvons aussi lire dans le rapport que 62% des personnes interrogées réfutent l’existence d’une crise inter ou intracommunautaire dans la région de Mopti. Ces personnes  sont surtout à Bamako (80,3%), à Koulikoro (79,7%) et à Gao (80%). Par contre, dans la région de Mopti, foyer des conflits locaux, 83% des enquêtés affirment l’existence d’une crise entre les communautés. Les causes de ces conflits sont relatives au foncier, affirme-t-on à Ségou (80,6%), Sikasso (59,2%) des personnes sondées.

La soif de justice

L’étude met en avant le besoin de justice pour les Maliens : « 93% de la population pensent importants les enquêtes et jugements sur les acteurs coupables de crimes et violences contre les populations dans la région », lit-on dans le rapport. Il est tout aussi important d’assainir l’institution judiciaire, un pilier essentiel pour le retour de la paix afin de favoriser l’installation d’un climat de confiance avec la population.

La justice est-elle corrompue ? Au moins 89% des citoyens répondent par l’affirmative. Il est aussi à noter que les procédures judiciaires sont largement méconnues par la population. Cette ignorance est criarde dans la région de Mopti où 98% des sondées disent ignorer les procédures judiciaires. Au niveau national, cette méconnaissance concerne 92,6% de la population.

Pour faciliter le retour de la paix et donner une porte de sortie  à ceux qui ont pris les armes contre la République, le gouvernement a initié une loi dite « Loi d’entente nationale ». Elle a été promulguée le 24 juillet 2019.   Selon le rapport, cette loi est quasiment méconnue dans les régions les plus durement touchées par les conflits. À Ségou et Mopti, plus de 90% des citoyens disent ignorer l’existence de la loi. Ce chiffre est de 99% à Kidal.

Cette étude de la Fondation Friedrich-Ebert (FES) est un excellent outil non seulement pour les pouvoirs publics, mais aussi pour les organisations de la société civile. Il permet de revoir les approches, d’ajuster les décisions politiques pour un meilleur résultat axé sur l’appréciation des citoyens et leur implication dans la gestion des affaires publiques.

Source : benbere