Des membres du gouvernement Modibo KEITA en plein exercice sur un champ de tirs, pour une simulation d’intervention des Forces spéciales antiterroristes (FORSAT), dans un pays en crise, sous prétexte de se familiariser avec des mesures de sécurité. Voilà la scène comique de très mauvais goût à laquelle les Maliens ont assisté, le week-end dernier, sur les réseaux sociaux, dont les images ont vite fait le tour du monde. Besoin de sécurité ou comédie gouvernementale ?

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Au moment où notre pays fait toujours face à une des crises les plus douloureuses de son histoire, au moment où nos soldats sur le front abdiquent face à l’ennemi, parce qu’ils sont à cours de munitions, voilà des ministres du gouvernement qui s’offrent en spectacle sur un champ de tirs pour certainement s’initier au métier des armes. Pourquoi une telle décision et maintenant ? Quel message, ces ministres de la République entendent donner aux populations, à travers cet exercice ? Se considèrent-ils comme les derniers remparts de nos populations à Bamako en cas de débordement sur le front ? Ces membres préparent-ils leur repli tactique ou stratégique au cas où ? En tout cas, l’opinion depuis ce week-end, veut comprendre cette attitude des ministres d’un gouvernement dont le pays est en proie à des attaques djihadistes. Le cinéma servi a provoqué l’ire et l’indignation de nombre de Maliens qui venaient d’apprendre avec consternation la perte de plus d’une dizaine de ses soldats suite à des combats épiques, d’une rare violence, dans la région de Mopti où des soldats ont opté pour le repli faute de munition. Au même moment, ce sont des ministres flanqués de garde-corps, et haut fonctionnaire de défense, qui partent apprendre à manier les armes, au grand mépris de nos populations meurtries.
Si le choix peut être pertinent pour des membres d’un gouvernement qui se soucie en premier lieu de sauver leur tête en cas de besoin, le moment est loin d’être opportun. Parce que les munitions, nous en avons besoin au front, du carburant également.
Comme s’il s’agissait de se moquer des Maliens, on rapporte qu’un briefing sur le tir a permis aux invités de marque du jour de se familiariser avec les mesures de sécurité indispensables en la matière.
« Sous l’œil vigilant des instructeurs de tir de la Police nationale, les ministres ont pu effectuer leurs tirs sans incident », se réjouissent les initiateurs. Aussi, cette journée, ajoute-t-on, aura été une aubaine pour les membres du gouvernement de s’imprégner des réalités des conditions de travail des forces de sécurité ».
A-t-on besoin de s’essayer en tirs pour s’imprégner des conditions de travail de nos forces de sécurité ? Absolument non !
Comme dit un adage bambara « Môgô bè Allah yé ka sôro i mii djan ! » autrement, il y a une autre façon d’apercevoir le ciel, sans se mettre sur le dos. En effet, au regard du contexte sécuritaire très tendu, le front social en ébullition, avec les cortèges de revendications syndicales, les ministres du gouvernement Modibo KEITA ont d’autres chats à fouetter que de s’adonner à de tel spectacle.
En soif de s’adonner à un verbiage insensé, les motifs avancés par le ministre KONATE qui a intervenu au nom de ses collègues acteurs de la comédie servie, n’ont en tout cas convaincu personne.
Selon lui, cette visite était la toute première fois pour bon nombre de ministres, à la fois de fouler le sol de l’École nationale de Police et de son champ de tir, mais aussi de tenir une arme et de tirer. Résumant l’esprit de cette rencontre, Me KONATE dira « La loi n’a de sens que lorsqu’elle est défendue et la meilleure défense de la loi ce sont les armes », avant d’ajouter « les armes sont aussi barbares qu’elles peuvent être civilisées parce que force demeure, doit impérativement rester à la loi ».
En tout cas, loin d’être une occasion de s’enquérir des conditions de travail de nos forces armées et de sécurité, cette scène de mauvaise publicité pour le gouvernement serait plutôt un exercice d’entrainement à un repli stratégique au cas où…

Par Sékou CAMARA

 

Source: info-matin