Chargée de surveiller et de veiller au bien-être des détenus, la Direction nationale de l’Administration pénitentiaire et de l’Education surveillée (DNAPES) est un service méconnu du justiciable. Pour corriger cette situation, le directeur de la DNAPES, le magistrat Ibrahima Tounkara, a initié une table ronde avec la société civile de Ségou. C’était samedi dernier, avec l’appui financier du programme américain Search for Common Ground.

«Une mission exaltante mais peu connue des citoyens». C’est en ces termes que le directeur de la DNAPES a fixé le cadre de la rencontre de Ségou. «C’est grâce à nous que la société est mise à l’abri de la terreur des délinquants. L’objectif de cette table ronde est de faire connaître nos actions», a-t-il indiqué aux membres de la société civile fortement représentée par les associations féminines. Dans son discours introductif, Ibrahima Tounkara a invité la société civile a visité les prisons. Cela, a-t-il conclu, va leur permettre de comprendre le mode fonctionnement des prisons et de s’enquérir des conditions de détention.                         

A Ségou, la société civile a eu droit un état des lieux de nos prisons dont la plupart ont été construites avant l’indépendance. Une présentation du Col Abdoulaye Idrissa Maïga, le DGA de la DNAPES. Le Mali compte, aujourd’hui, 59 prisons dont 52 maisons d’arrêt et de correction, 04 pénitenciers agricoles et la Maison centrale d’Arrêt de Bamako. Au total, on dénombre 5881 détenus dont 2317 à Bamako. Seulement 38,45% de ces détenus sont des condamnés. Le reste, la grande majorité, est sous le coup d’une inculpation ou ce sont tout simplement des prévenus. Avec moins de 500 agents, les services pénitentiaires sont en sous-effectif. Une autre difficulté de la DNAPES, en plus de son maigre budget, est surtout la situation géographique des prisons. Situées dans les villes ou dans les camps de la garde nationale, les prisons sont assez exiguës et même quand des partenaires veulent aider à l’espacement, ils sont confrontés au problème d’espace. Soit la garde nationale ne veut pas d’une prison trop grande dans ses camps, soit ce sont les populations qui s’y opposent.

«Humaniser» les centres de détention

Depuis trois mois qu’il est aux commandes de l’administration pénitentiaire, le magistrat Ibrahima Tounkara, entend «humaniser» les centres de détention au Mali. Pour y parvenir, le directeur de la DNAPES compte sur la société civile malienne. «Sans société civile, il n’y a aucun développement», a-t-il indiqué. Et d’ajouter: «La prison n’a pas vocation à détruire, mais d’éduquer ou de rééduquer. On n’a besoin de votre accompagnement. Car, une fois sorite de chez nous, l’insertion des détenus devient l’affaire de toute la société». Aussi, pour favoriser le dialogue au sein de l’administration pénitentiaire, la 1ère conférence annuelle des directeurs régionaux et des régisseurs de prison a été organisée les 08 et 09 décembre dernier à Ségou. D’autres mesures notamment le développement des pénitenciers agricoles ou encore l’Institutionnalisation de la «semaine du détenu» sont envisagées par la nouvelle direction. Sans oublier la construction de la prison de Kénioroba d’une capacité d’accueil de 2500 détenus avec toutes les commodités modernes.

«La rencontre m’a permis de savoir énormément de choses sur les prisons et les détenus. Aujourd’hui j’ai compris en tant que membre de la société civile que je peux rendre visite aux prisonniers pour savoir comment ils vivent. Non seulement cela, mais aussi, je sais que je peux leur apporter de la nourriture  ou des vêtements», témoigne Bintou Traoré de l’Association Laïdou. Quant à Ibrahima Tankara président de l’ONG Groupement pour les Actions de Développement Communautaire (GADEC), il salue aussi la rencontre. «Le respect des droits des détenus est l’une des missions de notre ONG. Au Mali, le dépassement des délais sont courants dans nos prisons. La table ronde nous a permis de créer un cadre d’échange avec l’administration pénitentiaire et surtout d’envisager la mise en en place d’un comité de suivi des recommandations de cet atelier», a-t-il affirmé.

Search for Common Ground est une ONG qui œuvre dans la gestion du conflit. Cet appui à la DNAPES s’effectue dans le cadre de son projet MAR 038. Selon Sylla Fatoumata Bintou Konaté, assistante au programme, l’objectif est de veiller au bien-être des prisons par des ateliers de formation notamment la menuiserie, le maraîchage ou la couture. Cinq prisons ont été choisies à Bamako, Ségou et Sikasso. Les détenus seront formés afin qu’à leur libération ils puissent entreprendre sans tomber dans les mêmes vices qui les ont conduits en prison. Après Ségou, l’ONG prévoit une série d’activités comme la retraite des régisseurs de prison à Sikasso, en mi-janvier.