Le bateau-Mali battant pavillon CNSP avec le colonel-major Bah N’Daw aux commandes n’a pas encore fait naufrage, mais l’embrasement du rivage social avec les politiciens en embuscade constitue une alerte suffisante pour lancer un SOS.

La tension monte, ça brûle de partout. L’absence d’alternance pour ne pas dire l’incapacité des autorités de Transition à faire patienter faute de pouvoir satisfaire les attentes légitimes des populations en termes de sécurité et des masses laborieuses en termes de prise en charge des doléances entraine logiquement une levée de boucliers au front sociale. Telles des grèves perlées, les mouvements syndicaux sont en passe de devenir la donne redondante d’une transition qui se voulait apaisée et inclusive. Aux administrateurs et agents de l’État en grève illimitée, depuis une dizaine de jours, pourrait rejoindre les enseignants du supérieur, les travailleurs des Affaires étrangères, les surveillants de prison, et, qu’à Dieu ne plaise, tous les bataillons de la Centrale syndicale.
La légitimité des revendications, toutes anciennes, est clairement aux antipodes des raccourcis et simplismes argumentaires servis jusqu’ici. Pour exclure tous ceux qui les gênent et conforter la mainmise des putschistes sur tous les segments de l’État, on agite la partialité des politiques et la neutralité des militaires. Mais quelle expertise a-t-il un colonel pour décider de l’avenir des politiques à la place des politiques ? Que connaît-il des subtilités électorales ?
Si l’on concède l’équipe dirigeante, la science infuse et la suprême onction divine de pouvoir décider de tout à la place de tout le monde, on ne répond cependant pas à la question pourquoi l’insécurité charrie et explose (Farabougou) avec les militaires aux commandes de l’État ? La mise à l’écart des agitations et des ambitions politiques n’expliquent pas comment et pourquoi les aspirations légitimes des populations à la sécurité et des travailleurs à l’amélioration de leurs conditions de vie et de travail doivent être gelées pour permettre à un clan au pouvoir de faire la pluie et le beau temps aux frais de la princesse. Le manque de moyens ne peut comme l’expliquent les syndicats être qu’à géométrie variable ; car rien ne justifie ni l’introduction d’une vice-présidence ostentatoire ni le maintien encore du CNSP, malgré les instructions données par les chefs d’État de la CEDEAO. L’Etat ne peut être providence pour les uns et proverbiale pour les autres.
C’est ensemble qu’on fera le Mali. C’est dans l’unité et dans l’inclusion qu’on réussira une Transition apaisée. Sortons des éléments de langage préfabriqués qui ne convainquent personne. Il faut sauver la Transition : éteindre le feu au front social, restaurer la sécurité et apaiser le climat politique.

PAR BERTIN DAKOUO

Source : INFO-MATIN