À l’invitation du Représentant spécial du Secrétaire général et Chef du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS), Mohamed Ibn Chambas, les chefs des missions des Nations Unies en Afrique de l’Ouest ont tenu leur 35e réunion de haut niveau, ce 4 février 2020 à Dakar, au Sénégal. À l’ordre du jour de cette rencontre, le renforcement de la coordination afin d’améliorer les synergies pour relever les défis communs auxquels sont confrontées les régions de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel.

Les représentants spéciaux du Secrétaire général des Nations Unies au Mali (MINUSMA), Mahamat Saleh Annadif ; en Guinée-Bissau (BINUGBIS), Rosine Sori-Coulibaly ; et pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS), Mohamed Ibn Chambas, étaient présents. Le Représentant spécial du Secrétaire général des Nations unies pour l’Afrique centrale (ONUCA), François Loucény Fall, les coordinateurs résidents des Nations unies pour la Côte d’Ivoire, Philippe Poinsot, et le Libéria, Kingsley Amaning, et le directeur de la Division Afrique de l’Ouest du Département des Affaires Politiques et de la Consolidation de la Paix et des Opérations, Abdel-Fatau Musah, étaient également présents.

Tendances politiques

Les discussions ont porté sur la situation et les tendances politiques, socio-économiques et sécuritaires en Afrique de l’Ouest et au Sahel, ainsi que sur leur impact sur les régions voisines, notamment la région d’Afrique centrale.

Comme il est de nature protocolaire en ces genres de circonstances, les participants ont exprimé leurs condoléances aux familles des victimes d’attaques d’extrémistes violents, tant civils que militaires, notamment au Mali, au Burkina Faso et au Niger, ainsi que dans le Bassin du Lac Tchad, tout en condamnant fermement lesdites attaques. Ils ont souligné la nécessité d’une approche multidimensionnelle et régionale pour s’attaquer aux causes profondes de l’insécurité et ont appelé à une coopération renforcée entre tous les acteurs et gouvernements concernés.

Ils ont examiné la situation en Côte d’Ivoire et se sont félicités du lancement récent par le gouvernement d’une nouvelle phase de dialogue politique sur le code électoral, à l’approche de l’élection présidentielle de 2020. Les chefs de mission ont exprimé leur inquiétude face aux tensions et à la violence politiques actuelles ainsi qu’aux violations des droits de l’homme en Guinée, et ont appelé tous les acteurs à faire preuve de retenue et à engager un dialogue constructif pour résoudre leurs différends avant les prochaines élections législatives et présidentielles dans le plus grand respect des principes démocratiques et de l’État de droit.

Les chefs de mission ont noté avec satisfaction la tenue du Dialogue National Inclusif au Mali soutenant que les résolutions et recommandations qui en ont résulté témoignent de l’importance et de la pertinence des débats, ce qui laisse présager une amélioration du climat politique. La reprise des travaux du Comité de Suivi de la mise en œuvre de l’Accord pour la Paix et la Réconciliation au Mali doit être saisie comme une opportunité pour accélérer le processus de paix, selon les participants. Les chefs de mission ont exprimé leur préoccupation face à la détérioration de la situation sécuritaire et ont déploré les pertes en vies humaines des forces maliennes et étrangères, dont ils ont salué les sacrifices. Ils ont également encouragé le gouvernement malien à continuer de prendre les mesures nécessaires, avec l’appui de la MINUSMA, pour trouver des solutions politiques durables à la situation préoccupante dans le centre du pays.

Interpellation des acteurs nationaux

Pour ce qui concerne le Sénégal, ils se sont félicités du dialogue politique en cours au Sénégal, ont exprimé leur satisfaction au sujet des étapes importantes franchies jusqu’à présent et ont noté qu’un accord consensuel sur un nouveau code électoral avant les élections locales consolidera encore le bilan du Sénégal en matière de gouvernance démocratique. Ils se sont également félicités de l’engagement politique ferme de mettre pleinement en œuvre toutes les recommandations, dans le but de renforcer la cohésion nationale qui aidera au développement national.

Pour l’ensemble des pays de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel, les chefs de mission ont indiqué que, bien que le déroulement des élections dans la région continue de s’améliorer, les périodes pré et post électorales continuent d’être marquées par des tensions. À cet égard, ils ont appelé les autorités et les acteurs nationaux à travailler ensemble pour garantir des conditions qui contribuent à créer un environnement propice à la tenue d’élections pacifiques, inclusives, transparentes et crédibles en Guinée, en Côte d’Ivoire, au Niger, au Burkina Faso, au Togo et au Ghana en 2020.

Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme qui gagne du terrain dans l’espace du Sahel, les participants ont salué l’intensification des opérations de la force conjointe du G5 Sahel, conformément aux récents engagements pris à Pau (France) le 13 janvier 2020 par la France et les pays du G5 Sahel. Dans cet espace, les chefs de mission ont exprimé leur profonde inquiétude face à la violence contre la population civile et les forces de sécurité et de défense, qui a augmenté dans la région du Sahel en 2019. Ils ont déploré qu’au Mali, au Niger et au Burkina Faso, les groupes armés terroristes ont pu étendre leur présence, entraînant un nombre sans précédent de personnes déplacées à l’intérieur du pays. Ils ont salué la volonté collective des sept pays de la région, dans le cadre de l’initiative d’Accra, de renforcer le partenariat transfrontalier.

Cycle de violence et de vengeances

Aussi, tout en félicitant la Force multinationale conjointe du G5 pour le Sahel et les Forces de sécurité et de défense des pays touchés par les conflits, les chefs de mission ont exprimé leur vive inquiétude face au cycle de violence ethnique et de vengeance qui cible les civils, tant par des acteurs étatiques que non étatiques, au Burkina Faso et au Mali ; à la détérioration continue de la situation sécuritaire dans les pays du Bassin du lac Tchad ; aux enlèvements contre rançon, aux attaques de bandits et de milices et aux affrontements entre éleveurs et agriculteurs dans tout le Nigeria ; et à la situation humanitaire difficile qui prévaut dans toute la région. Les chefs de mission ont souligné la nécessité d’adopter une approche globale pour relever les défis posés par les organisations terroristes et les autres acteurs non étatiques violents, en mettant l’accent sur la sécurité, le respect des droits de l’homme et de l’État de droit, la gouvernance et le développement, tout en encourageant les autorités à continuer d’intégrer la stratégie régionale pour la stabilisation, le redressement et la résilience des zones touchées par le Boko Haram dans le Bassin du lac Tchad.

Les chefs de mission ont salué les efforts déployés par les partenaires nationaux, régionaux et internationaux dans la lutte contre la criminalité transnationale organisée et le trafic dans la région, en reconnaissant que le fléau de ces pratiques continue d’aggraver l’insécurité et de menacer la stabilité de la région en finançant des organisations terroristes et d’autres groupes violents et en sapant l’autorité de l’État et les économies officielles de la région. Les chefs de mission ont réitéré la menace que représente la criminalité transnationale organisée, des trafiquants d’armes, d’êtres humains et de drogues illicites, ainsi que le lien entre ces activités et les organisations terroristes et autres groupes violents de la région ; ils ont également souligné l’urgence des efforts déployés par les Nations Unies et d’autres partenaires internationaux pour soutenir et aider à renforcer la capacité des institutions nationales à lutter contre ces facteurs de terrorisme et d’extrémisme violent.

Par Sidi DAO

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