L’année 2020 risque de commencer comme 2019 avait fini, c’est-à-dire, l’ébullition du front social et politique. Avec la mise en œuvre des principales recommandations du dialogue national inclusif et la non satisfaction de certaines revendications syndicales, notamment celles des enseignants, le gouvernement du Dr. Boubou Cissé va devoir traverser (encore) des zones de turbulences sans oublier le procès du général Amadou Aya Sanogo et consorts annoncé pour le 13 janvier prochain.

 

Déjà les enseignants ont donné le ton avec des menaces de grève si certains points de leurs revendications ne trouvent pas de satisfaction. La grève dans le secteur de la santé a été évitée de justesse en cette fin de l’année 2019. D’autres défis attendent le gouvernement qui a réussi à organiser le Dialogue national inclusif (DNI). Parmi ces défis, il y a la mise en œuvre des recommandations du DNI notamment celles concernant l’organisation des élections législatives maintes fois reportées pour déficit budgétaire et le référendum. Ce sont ces deux recommandations qui constituent les épreuves les plus difficiles à relever pour le gouvernement de Dr. Boubou Cissé dans un contexte marqué par une insécurité accrue.

Arrivé à la tête de l’exécutif pour remplacer Soumeylou Boubèye Maïga, balayé par la pression de la rue, Dr. Boubou Cissé, malgré son jeune âge, a su mener l’action gouvernementale à travers les écueils. A son actif, la constitution d’un gouvernement de large ouverture incluant des membres influents de l’opposition. Ce qui a amené une certaine accalmie sur le plan politique, l’arrêt presque total des massacres intercommunautaires dans la partie septentrionale du pays et la tenue du DNI. Autres points de satisfaction à noter dans l’action gouvernementale courant 2019, c’est l’accord trouvé avec les principales centrales syndicales ce qui a permis de terminer l’année en douceur malgré toutes les difficultés exprimées.

Mais, l’arbre ne doit pas cacher la forêt. Les problèmes, le Mali en connait énormément en ce moment. Et tout ce qui n’a pu être résolu en 2019, pourrait resurgir en 2020 comme l’a fait rappeler le syndicat des enseignants qui menace d’observer une longue grève si ces points de revendications n’étaient pas satisfaits.

L’organisation du dialogue national inclusif était censée permettre aux Maliens de parler et de trouver ensemble des solutions aux problèmes qui gangrènent le pays. Tous n’y étaient pas à ce rendez-vous. Mais, ceux qui y étaient, ont parlé et leur voix compte.

L’un des principaux problèmes actuels du pays, c’est la crise politique. Les acteurs politiques se font la guerre et ne se montrent pas solidaires dans la résolution de la crise sécuritaire provoquée par des groupes rebelles armés et terroristes. Toute chose qui créé et entretient la division entre Maliens et favorise l’expansion du mal à l’intérieur du pays. Le dialogue national inclusif en a parlé. Mais, y a-t-il une solution miracle quand les fils du même pays ne se parlent pas ? C’est ainsi qu’il faut voir la difficulté

d’application des recommandations du DNI qui préconise l’organisation d’un référendum qui débouchera à la réforme constitutionnelle.

Ça passe ou ça casse ?

Le président IBK, durant son premier quinquennat, a tenté en vain ce référendum constitutionnel. Face à l’hostilité de la rue, il avait dû surseoir au projet. Entre temps, beaucoup d’eau a coulé dans le fleuve Djoliba. Des acteurs très hostiles à la tenue du référendum constitutionnel, sont maintenant dans l’équipe gouvernementale qui doit organiser le référendum. Est-ce un signe d’espoir que les choses marcheront mieux que par le passé ? Rien n’est plus sûr quand on sait qu’une partie de la classe politique a boycotté le DNI. Cette opposition va-t-elle s’opposer à la mise en application des recommandations issues de ce dialogue national ? Si oui, quel comportement le gouvernement va-t-il adopter ? Va-t-il tenter le passage en force ? Ou, va-t-il (encore) reculer en cas de difficulté majeure ?

Les élections législatives ont été maintes fois reportées malgré la fin du mandat des députés. Même si l’aspect financier n’a pas été évoqué officiellement pour justifier ce report, il est à noter que les caisses de l’Etat sont à moitié vides ou presque vides.

Dans un contexte où le terrorisme impose son propre agenda et que le gouvernement doit trouver les moyens (financiers) pour répondre avec efficacité à la menace, l’organisation d’une élection législative peut être repoussée surtout si la loi l’autorise. Seulement, cette loi a ses limites et la tenue du scrutin devient un impératif. La question est la suivante : Boubou Cissé saura-t-il trouver les ressources nécessaires pour organiser le scrutin d’ici le mois de mai 2020 ? Pourra- t-il également organiser le même scrutin sur toute l’étendue du territoire national afin de lui donner toute la légitimité nécessaire ? Le 13 janvier, le droit sera-t-il dit dans l’affaire des bérets rouges ?

Comme on peut le constater, les défis à relever sont nombreux et aussi difficiles qu’ils se présentent dans un contexte difficile. Mais, ne dit-on pas que les grandes nations ont été construites dans la douleur ! La Mali en est une.

Issiaka GuindoÉtudiant en Master 2 Investissement international et développement territorial à la faculté de Droit Cadi

Mali Tribune