Il y a quelques semaines, un message audio du Général Gamou a fait le tour du monde grâce à la magie des nouvelles technologies de l’information. L’Officier des Forces armées maliennes, non moins membre influent du Groupe d’Autodéfense touareg Imghad et  Alliés-GATIA- demandait aux communautés vivant dans les campements de regagner les grandes villes, afin d’éviter les combattants de l’Etat islamique dans le Grand Sahara (EIGS) qui détruisent tout sur leur passage.

Dans un communiqué en date du 17 septembre 2022, l’Adema-Pasj a exprimé ses vives préoccupations face à  la détérioration dramatique de la situation sécuritaire dans la région de Ménaka et une partie de Gao. « En effet, depuis quelques jours, l’Adema-Pasj constate avec désolation que des attaques d’une extrême violence du groupe djihadiste Eigs ne cessent de se multiplier dans les régions de Ménaka et de Gao, occasionnant des massacres épouvantables, des incendies et pillages de villages et hameaux ainsi que des déplacements massifs des populations civiles».

Dans un enregistrement audio de 20 mn, largement diffusé sur les réseaux sociaux, le Secrétaire général du Mouvement pour le salut de l’Azawad -Msa- Moussa Ag Acharatoumane, a évoqué la menace, la stratégie et le mode opératoire de l’Eigs. Cet ancien du Mnla, actuellement membre du Conseil national de transition -Cnt- confirme l’avancée de l’Eigs dans la zone de Ménaka. A l’exception notable de la seule ville de Ménaka, précise-t-il, tout le reste de la localité est sous le contrôle de l’Eigs qui se singularise par ses méthodes d’une extrême cruauté.

Ainsi les sorties du Général Gamou et du Secrétaire général du Msa lèvent tout équivoque sur l’avancée de ce groupe terroriste dans les régions de Ménaka et de Gao avec son corollaire de massacres, de villages incendiés et de déplacements massifs des paisibles populations. Aujourd’hui, les situations sécuritaire et humanitaire dans ces localités sont extrêmement préoccupantes. Les informations fournies par les observateurs ne sont guère rassurantes car ces derniers redoutent plusieurs scénarios  possibles.

Les combattants de l’Eigs pourraient affronter ceux du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Gsim). En position de force, ils pourraient aussi essayer d’attaquer la ville de Ménaka après une période de harcèlement ponctuée de manœuvres de diversion. Plus grave : il n’est pas exclu que les deux groupes se coalisent pour attaquer les forces maliennes et celles de la Minusma stationnées à Ménaka. Déjà en 2012, malgré leur rivalité, les groupes armés extrémistes se sont mis ensemble pour combattre le Mali.

Malgré la tension actuelle entre Bamako et Niamey, il n’est pas évident que le Niger et ses partenaires resteront les bras croisés face à la menace Eigs. Dans le but de sécuriser ses frontières, Niamey frappera-t-elle les groupes radicaux sur le territoire malien avec ou sans l’aval de Bamako ? Quelle serait alors la réaction des autorités maliennes ? Car si Ménaka est à plus de 1 500 km de la capitale malienne, il est à moins de 300 km de Niamey et Gao est plus proche de la capitale nigérienne que de Bamako.

La seconde perspective liée à la menace de l’Eigs est la sécurisation des forces onusiennes à assurer en cas d’attaque. La Communauté internationale envisage-t-elle d’intervenir pour protéger les casques bleus de la Minusma avec ou sans l’aval de Bamako s’ils sont exposés aux attaques de l’Eigs ? Que pourrait-il se passer dès lors ?

Dans tous les cas, il urge de contrer l’Eigs dans ses manœuvres de conquête territoriale. La difficulté est peut-être de savoir s’y prendre. Le gouvernement malien œuvrera-t-il en synergie avec la Minusma et  ses voisins, notamment le Niger ? Le regretté Général Amadou Toumani Touré le répétait sans cesse : aucun pays seul ne peut gagner la guerre contre les groupes armés radicaux.

Par Chiaka Doumbia

Source:  Challenger