A tous les Maliens,

Aux autorités de la transition,                                         s

La situation à Farabougou, village de la Région de Ségou, est préoccupante. Assiégé par les groupes terroriste depuis de nombreux mois, un « accord de cessez-le feu » a été négocié entre les populations et les Groupes Armés terroristes par l’intermédiaire du Haut Conseil Islamique du Mali (HCIM). Cet accord que les autorités maliennes n’ont pas encore publié, imposerait :

  • Le port obligatoire du voile,
  • L’interdiction de la célébration des fêtes traditionnelles,
  • L’application de la charia…

Cet accord, si son existence se confirmait, piétine nos valeurs, nos principes et nos traditions, ciment de notre “vivre ensemble”. Il impose un nouvel ordre social, culturel, politique et religieux en contradiction avec notre histoire et nos us et coutumes. Inévitablement, il porte en lui les germes de réels problèmes qui finiront par achever l’unité et l’intégrité du Mali. Il serait anticonstitutionnel, antirépublicain et ouvrirait une brèche dans l’unité nationale.

Un accord sur les termes indiqués et issu des négociations de Farabougou, est en désaccord avec les fondamentaux de la République indivisible, laïque, souveraine et démocratique. Le risque est grand, car une telle démarche peut s’ériger en modèle dans le reste du Mali. Or une telle démarche peut achever le Mali que nous connaissons, hérité des grands empires et des pères fondateurs de l’Indépendance. C’est pourquoi, nous, membres du collectif, « Vers une communauté de l’espoir Mali », d’une part, rappelons le devoir de l’État de veiller à l’effectivité des droits garantis par notre constitution, dans son article 3 qui stipule que « Nul ne sera soumis à la torture, ni à des sévices ou traitements inhumains, cruels, dégradants ou humiliants,» de respecter nos engagements internationaux au rang desquels figurent la Déclaration universelle des Droits de l’homme et la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples ; d’autre part condamnons cette démarche et cet accord.

Il convient d’interroger le contexte sociopolitique et sécuritaire du pays qui s’est fortement dégradé. Les différents accords, conclus entre les groupes armés et les autorités maliennes, se sont avérés inefficaces pour redonner espoir aux Maliens. L’Etat dysfonctionne. Les intérêts généraux sont sacrifiés au profit de dispositifs de paix improvisés. Lesquels dispositifs se retourneront tôt ou tard contre les fondamentaux de la République démocratique, laïque et souveraine.

C’est pourquoi nous Maliens de l’intérieur et de l’extérieur, réunis au sein de l’organisation, « Vers une communauté de l’espoir Mali », demandons aux autorités de faire la lumière sur cet accord, « l’accord de la résignation ». Les autorités de la transition n’ont-elles pas pour objectif de renforcer la sécurité et de stabiliser le Mali ? N’est-il pas écrit dans le préambule, titre I de la Charte de la transition, qu’il est désormais question de préserver les « … principes républicains et le renouveau de la démocratie et de la citoyenneté… ». Hélas ! Force est de constater que la gestion actuelle de la crise de Farabougou, parmi tant d’autres, nous mènera à une autre crise si l’Etat malien ne reprend pas la main.

Au-delà de Farabougou, c’est tout le Mali qui est encore une fois humilié. Cette situation illustre la crise de souveraineté de l’Etat dans certaines parties du Mali. Ainsi, à Farabougou comme dans de nombreuses autres localités du Mali, les populations sont-elles privées de tout : sécurité, liberté d’aller et de venir, impossibilité de mener une activité agricole ou d’élevage. Au cours des dernières décennies, les Maliens ont été inquiétés, terrorisés et humiliés.

Les causes des problèmes sont connues. Il faut maintenant y faire face avec courage. Le mouvement de 1991 n’a pas réussi à doter le Mali d’institutions solides. Les troubles de 2012 ont précipité le Mali dans le gouffre. Les contestations populaires de 2020 et la transition en cours risquent de passer à côté de leur cible qui est de penser les fondements d’institutions fortes pour affronter le futur. Il faut être capable de redonner un autre visage au Mali. Ce nouveau visage est sans doute celui qui aspire à la paix et au mieux vivre ensemble dans une société qui en a besoin. Cela suppose des renoncements. Renoncer aux schémas habituels de pensée, nocifs et sources de violence et de division. Renoncer aux pratiques qui ont toujours ruiné la subtilité des rapports sociaux entre les Maliens. Cela suppose aussi d’épouser de nouvelles modalités de fonctionnement. Accepter des valeurs qui prônent le dialogue entre les Maliens sur les sujets de préoccupations locales et globales. Accepter de se remettre en question pour plus de transparence dans la conduite des affaires publiques. Accepter d’avancer ensemble vers notre destin commun. Nous le devons pour nous, nos enfants, les futures générations et pour l’histoire du Mali.

La présente lettre est adressée à tous les Maliens, mais aussi aux autorités de la transition.

Vers une communauté de l’espoir Mali

Cette prise de parole est l’œuvre d’une communauté, comme il en existe beaucoup en ce moment, qui se préoccupe du sort de notre Nation. Cette communauté est composée d’acteurs d’univers divers, de Maliens de l’intérieur et de l’extérieur. Elle affirme son attachement à des valeurs supérieures d’engagement de l’intellectuel, d’intégrité, de patriotisme et d’honneur. Cette nouvelle communauté est au travail tout en étant très attentive à l’évolution du contexte socio-politique du Mali. Ses actions visent la participation active aux efforts de reconstruction du Mali. Elle le fera par tous les moyens à sa disposition.

Objectifs :

  • Réunir les personnes ressource dans la diaspora malienne et à l’intérieur du pays dans le cadre d’une réflexion globale et d’actions structurées autour de plusieurs thématiques pour transformer positivement la société malienne et d’apporter des pistes de solutions aux problèmes nationaux ;
  • Rechercher les causes profondes à la crise multidimensionnelle que connait le Mali depuis plusieurs décennies et trouver des solutions à la fois collégiales et partagées ;
  • Participer aux actions de reconstruction de l’Etat par des réflexions et des actions sur notamment la gouvernance, l’éducation et l’économie.

Pour le Mali, avril 2021