L’Otan doit réfléchir à une implication au Sahel, a estimé mercredi le Premier ministre letton Krisjanis Karins dans une interview à l’AFP, en s’interrogeant sur la finalité de “l’autonomie stratégique” européenne prônée par Emmanuel Macron.

“C’est un débat que nous devrions avoir à l’Otan: quel est ou quel devrait être son rôle au Sahel ?”, a-t-il lancé, avant un entretien avec le président français à l’Elysée. “L’Europe devrait peut-être être plus active au Sahel à travers l’Otan”, a-t-il suggéré en soulignant que beaucoup de pays de l’Alliance sont déjà engagés au Mali sous la bannière de la Minusma, la force de l’ONU ou de l’Union européenne (mission EUTM de formation de l’armée malienne). Une dizaine de pays européens – dont l’Estonie, la République tchèque et la Suède – participent aussi au groupement européen de forces spéciales Takuba, à l’initiative de la France, au Mali. Mais pas la Lettonie. Et Krisjanis Karins est resté très circonspect à ce sujet. “Nous sommes (déjà) présents avec des instructeurs” pour la formation de soldats maliens, a-t-il dit. Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a évoqué en octobre des “options” pour un soutien accru de l’Alliance atlantique à la force conjointe antijihadiste de l’organisation régionale G5 Sahel (Mauritanie, Mali, Niger, Burkina Faso et Tchad), en termes de “soutien et d’approvisionnement”. Mais la discussion sur une implication directe au Sahel de l’Alliance n’a “jamais embrayé”, selon une source diplomatique française qui rappelle que l’Otan était jusqu’à peu lourdement engagée en Afghanistan. Le Premier ministre letton a de nouveau pointé les craintes des Etats baltes, en première ligne face à la Russie, qu’un renforcement de la défense européenne ne se fasse aux dépens de l’Otan. “Si vous dites autonomie stratégique, cela veut dire découplage, dénouement d’un lien”, a-t-il affirmé. “C’est comme si vous rentrez à la maison et que votre époux ou épouse vous dit +je veux de l’autonomie stratégique+. Pour tout le monde, ça veut dire un divorce”, a-t-il renchéri. Une Europe plus forte militairement ne doit pas conduire à affaiblir l’Otan, met-il en garde, à l’opposé de la France qui juge qu’une défense européenne renforcée ne peut être que complémentaire de l’Otan. “Nous avons tous des ressources limitées. Il ne faudrait pas créer quoi que ce soit qui prenne des ressources à l’Otan pour les mettre ailleurs”, a-t-il martelé.

Source : AFP