Le chemin est encore long, très long, pour que le Mali nouveau chanté en longueur de journée soit. Eh oui ! Le chemin est long parce que les responsables en charge de la gouvernance du pays ont changé, mais les pratiques combattues, il y a de cela quelques mois, demeurent, surtout la normalisation de la violation des lois par certaines catégories de personnes : injustice sociale. Le chemin est et restera long pour le Mali nouveau tant que le citoyen malien ne décide pas de changer, ne s’impose pas le respect des lois de la République. Pour l’heure, ce Mali Kura reste un mirage.

Le changement n’est pas dans le mot, mais dans la pratique. Mais au Mali, c’est le contraire qui est en marche. Tout le monde réclame le changement, tout le monde dit se battre pour le changement, mais personne n’est prête pour que ce changement tant souhaité commence par lui. Personne n’est prête à abandonner ses anciennes pratiques malsaines. Chacun veut que le changement vienne et se fasse seulement au niveau de l’autre. Les anciens opposants, une fois au pouvoir, continuent les pratiques qu’ils ont combattues avant. Certaines catégories de personnes, politiques comme religieux, se croient au-dessus de la loi et piétinent les décisions de la République. Les gouvernants mêmes admettent cela. Quant aux militants et sympathisants de ces personnalités « intouchables », ils défendent les violations de la loi en faveur de leur idole ; ils applaudiront les autorités qui, par peur ou volonté d’encourager les violations de la loi, se taisent sur ces pratiques qui ne peuvent être que des bombes à retardement. Quant au citoyen, il ne voit le mal que du côté des autorités. Lui-même n’est jamais prêt pour le changement. Voilà le malien ! Et c’est encore lui qui réclame, à tout moment, un Mali nouveau. Ce n’est pas impossible, mais le chemin est encore très long.

Le régime de IBK était caractérisé par le clientélisme, le favoritisme, des violations flagrantes des lois par certaines catégories de personnes…Ces pratiques sont combattues. IBK et son régime sont partis, mais certaines de ces pratiques sont toujours d’actualités. Le plus récent et regrettable est que les autorités transitoires, ceux-là qui ont la lourde charge de refonder l’État du Mali, tolèrent la violation des décisions de la République par certaines catégories de personnes tout en encourageant l’injustice sociale. Aussi, faut-il mentionner le non-suivi de l’application ou non des décisions prises.

Le respect de l’état d’urgence

Les autorités de la transition ont, dans le cadre de la lutte contre la propagation de la 2ème vague de la pandémie de Covid-19, décrété un état d’urgence. Plusieurs mesures ont été prises parmi lesquelles la fermeture des restaurants, bars et autres ; l’interdiction de tout rassemblement dépassant 50 personnes ; la fermeture des écoles…D’abord, comme sous IBK, les autorités ont épargné les lieux de culte, pourtant lieux de rassemblement. Par peur ? Elles seules ont la réponse à cette question.

Sur l’application de ces mesures, les autorités transitoires ont été de bons élèves d’IBK. Les décisions sont piétinées au vu et au su de tous. Après quelques jours de fermetures, les hôtels, les bars et autres ont ouvert leur porte. Les rassemblements dans les lieux de mariage continuent toujours. Sur le plan politique, même si le rassemblement est refusé à certains sous prétexte de l’état d’urgence, d’autres, des extra-maliens certainement, piétinent cette décision du gouvernement de la transition. C’est le cas de l’imam Mahmoud Dicko, ‘’acteur incontournable’’ qui a joué un rôle prépondérant dans la chute du régime IBK.

En effet, à son retour de l’Arabie saoudite, cet imam a été accueilli par des centaines de personnes à l’aéroport international Modibo Keita de Bamako. Le cortège l’a accompagné jusqu’à son domicile. Les autorités, venues pour instaurer, le Mali Kura n’ont pas daigné interdire ce regroupement qui viole les principes de l’état d’urgence. Elles ont ainsi, elles-mêmes, favorisé l’injustice sociale. Pourtant, ce sont ces pratiques que faisait IBK et qui étaient combattues. Où est donc le Mali Kura ?

Si chacun était réellement prêt pour le Mali, Mahmoud Dicko ne devrait pas accepter un rassemblement pour son accueil, car l’État a interdit tout regroupement de plus de 50 personnes. Quant aux autorités, elles ne devaient pas faire exception entre les citoyens quant à l’application d’une décision.

Les citoyens aussi, ceux-là qui ont dormi au monument de l’indépendance sous le règne d’IBK pour réclamer le changement devraient montrer le bon exemple tout en refusant de violer les lois de la République. Aussi, si chaque Malien était prêt pour le changement, pour l’avènement du Mali Kura, la démolition des constructions illicites dans la zone aéroportuaire ne devrait pas poser assez de problèmes.

Enfin, pour que le Mali Kura soit une réalité, il faut que chacun accepte de changer, que chacun accepte de respecter les lois de la République. Il faut forcément que les autorités soient exemplaires. Enfin, le citoyen aussi doit accepter le changement, accepter de se soumettre à la loi.

Boureima Guindo

Source: Journal Le Pays- Mali