La junte au pouvoir à Bamako appelle les Maliens à manifester vendredi contre les sanctions imposées par l’organisation des Etats ouest-africains. Dans le même temps, le colonel Assimi Goïta, chef de la junte, se dit ouvert au dialogue. Dimanche 9 janvier, la Cédéao a infligé au Mali une série de sanctions particulièrement sévères.

L’effet de ces mesures de rétorsion sur la junte mais aussi sur la population ajoutent à l’incertitude des lendemains dans un pays au coeur de l’instabilité sahélienne, théâtre de deux putsch depuis 2020.

Les autorités maliennes ont continué lundi soir à faire assaut de pugnacité et à se draper dans la défense de la patrie et de sa souveraineté, autour desquelles elles exhortent au ralliement.

L’heure est au rassemblement de tous les Maliens sans exclusive pour réaffirmer nos positions de principe et défendre notre patrie“, a déclaré dans un discours à la nation le colonel Assimi Goïta, porté à la tête du Mali par un premier coup d’Etat en août 2020 et intronisé président “de la transition” à la suite d’un second en mai 2021.

Le gouvernement installé par les militaires a pour sa part appelé dans un communiqué à la “mobilisation générale” sur tout le territoire vendredi.

© Gouvernement malien

L’embargo imposé par la Cédéao sur les échanges commerciaux et les transactions financières, hors produits de première nécessité, suscite la crainte de l’inflation et de la pénurie dans un pays pauvre et enclavé, éprouvé par les violences de toutes sortes et la pandémie de Covid-19.

Le colonel Goïta et le gouvernement assurent que des dispositions ont été ou seront prises pour parer ce risque, sans dire lesquelles. Le colonel Goïta a appelé au “calme” et à la “résilience“.

Les sanctions de la Cédéao ont suscité sur les réseaux sociaux de vives expressions de nationalisme ombrageux et d’hostilité contre la Cédéao. Le gouvernement a accusé la Cédéao de s’être laissée “instrumentaliser par des puissances extra-régionales”, référence claire à certains partenaires internationaux au premier rang desquels la France, engagée militairement au Sahel mais avec laquelle les relations se sont sérieusement dégradées depuis 2020.

 

Très peu de voix significatives, y compris parmi les adversaires de la junte, se sont élevées pour critiquer cette dernière et soutenir la Cédéao. Epreuve de force passagère ou durable, les intentions de la junte sont inconnues. “Le Mali reste ouvert au dialogue avec la Cédéao pour trouver un consensus“, a déclaré le colonel Goïta.

Frontières

Mais ni lui, ni le gouvernement malien n’ont pour le moment offert de perspective de sortie de crise. Le gouvernement a au contraire dit son intention d’élaborer “un plan de riposte“.

Les colonels s’étaient engagés en 2020 à rendre les commandes aux civils au bout de 18 mois. Ils disent à présent ne pas être en mesure de respecter l’échéance prévue du 27 février 2022 pour organiser des élections. Ils ont demandé jusqu’à cinq années de plus, un délai “totalement inacceptable” pour la Cédéao.

La France soutient la Cédéao

La France et l’Union européenne soutiennent les “sanctions inédites” prises dimanche par les dirigeants ouest-africains contre la junte au pouvoir au Mali, a déclaré mardi le président Emmanuel Macron.”Nous soutenons” les mesures diplomatiques et économiques prises par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) et l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) à l’encontre du Mali, a déclaré le chef de l’Etat français au cours d’une conférence de presse avec le président du Conseil européen Charles Michel à l’Elysée.

Lundi, l’ambassadeur français à l’ONU, Nicolas de Rivière, avait affirmé “le plein soutien” de la France à la Cédéao. Autre partenaire important du Mali, les Etats-Unis “saluent les mesures vigoureuses” de la Cédéao dans un communiqué.
L’ambassadeur russe adjoint à l’ONU, Dmitry Polyanskyi, a dit quant à lui “comprendre” les difficultés des autorités maliennes.

Soutien de Conakry

Les sanctions de la Cédéao ferment les frontières des Etats membres avec le Mali. Cependant la junte au pouvoir en Guinée a annoncé lundi soir que ses frontières étaient “toujours ouvertes à tous les pays frères”.

La junte guinéenne, portée au pouvoir en septembre 2021 par un troisième putsch en un an dans la sous-région, a souligné que le pays, comme le Mali, avait été suspendu des organes de la Cédéao. La Guinée n’a donc “en aucune façon été associée” aux sanctions, dit un communiqué lu à la télévision nationale.

Le Mali a quelque 800 km de frontière commune avec la Guinée. Outre cinq pays de la Cédéao, le Mali a des frontières avec l’Algérie au nord et la Mauritanie à l’ouest.

Source: TV5