Le 24 juin 2022, au moins 23 migrants africains ont perdu la vie après avoir tenté de pénétrer dans l’enclave espagnole de Melilla, au Maroc. Rabat qui demeure préoccupé par ces évènements, notamment le niveau de violence impressionnant de l’assaut, pointe du doigt un «laxisme délibéré» du voisin algérien en matière de contrôle de ses frontières avec le Maroc. Retour sur ces «incidents déplorables».

Le bilan de l’assaut du vendredi 24 juin 2022 perpétré par des migrants clandestins s’élève à 23 migrants décédés, 76 blessés. 140 éléments des forces de l’ordre ont également été blessés. Ce fut un assaut «inédit à plusieurs niveaux» selon plusieurs sources dont certaines affirment qu’il n’a pas été orienté de manière classique vers la clôture grillagée, mais vers le poste dit Bario-chino qui était réservé au passage des riverains de et vers la ville de Mellilia dans le Nord-Est du Maroc avant sa fermeture en 2020 suite au Covid 19.

Ce poste est doté de quatre couloirs étroits, et l’afflux massif des assaillants dans ces couloirs exigus a causé une grande bousculade. L’incident des migrants survenu à Mellilia relève d’une attaque «très violente, perpétrée par des réseaux mafieux de trafic des êtres humains et non pas d’une tentative de migration clandestine ordinaire».

«La violence des assaillants et la stratégie d’assaut qui a prévalu dénote un sens élevé de l’organisation, une progression planifiée et une structure hiérarchisée des meneurs aguerris et entraînés aux profils de miliciens expérimentés dans les zones de conflits», affirme encore la source. Les assaillants étaient armés de bâtons, de machettes, de pierres et de couteaux, et ont attaqué les forces de l’ordre blessant 140 agents dont 1 est toujours hospitalisé.

Rabat qui est consterné et attristé par ces morts causées, pour la plupart par l’effondrement de la barrière sans doute sous le poids des migrants, ne manque pas d’y voir la responsabilité de son voisin algérien à qui il reproche un « laxisme délibéré », qui a profité, selon lui, aux assaillants qui se sont infiltrés par la frontière algérienne.

«Ce drame, outre sa dimension de tragédie humaine, démontre l’extrême dangerosité et violence des réseaux de trafic qui sont prêts à tous les risques dans le déni total de la sacralité de la vie des personnes», relève la source.

Le Maroc déplore «cette tragédie humaine» et promet de continuer d’agir «avec fermeté et sans répit» contre les réseaux de trafic et cette minorité violente qui dévoie la dimension noble de la migration. Il assure également conforter «sa dynamique de gouvernance migratoire humaniste, inclusive et solidaire, dans la continuité de sa vocation éminemment africaine et autour du paradigme cardinal de protection des migrants et des victimes vulnérables».

Pour le Maroc, la politique d’intégration des migrants est un cap stratégique qui enrichit la diversité et la vitalité de la société marocaine; une société ouverte, hospitalière au carrefour des civilisations depuis des millénaires. Pour ce faire, Rabat assure qu’il ne tolérera pas qu’une minorité de migrants viennent pervertir la noblesse de la Stratégie Nationale d’Immigration et d’Asile (SNIA).

«Le Maroc renforcera également sa politique de retours volontaires des migrants vers leurs pays d’origine, dans le respect de leurs droits et dignité et en coordination avec les ambassades des pays africains frères et amis», informe le long communiqué de son ambassade à Madrid, appelant à une solidarité agissante entre le Nord et le Sud à travers des solutions structurelles de développement durable et d’encouragement des flux légaux.

Le Maroc continuera sa lutte sans merci et sans répit contre les réseaux de trafic et renforcera sa coopération avec ses partenaires dans le cadre de la responsabilité partagée et sa contribution majeure à la sécurité régionale.

Le Maroc qui a affirmé sa détermination à lutter «sans merci et sans répit contre les réseaux de trafic», réitère son engagement à renforcer l’ancrage de sa gouvernance migratoire humaniste et solidaire en matière de protection des migrants vulnérables et des victimes et «ne laissera pas les réseaux de trafic dévoyer la dimension noble de la migration».

Traitement de la question migratoire au Maroc

Le Royaume du Maroc a toujours été une terre d’accueil et a toujours défendu une approche équilibrée pour une migration humaine, globale, pragmatique et responsable.

La question migratoire est porteuse d’une sensibilité passionnelle car ses enjeux, au-delà de la mobilité, intègrent un paradigme cardinal centré autour de l’être humain dans la sacralité de ses droits fondamentaux.

C’est cette logique humaniste qui structure aujourd’hui la gouvernance migratoire au Maroc autour de la Stratégie Nationale d’Immigration et d’Asile (SNIA), initiée en 2013 qui a consacré cette approche solidaire et inclusive inscrite dans la continuité de la vocation éminemment africaine du Royaume.

La SNIA est une initiative inédite au niveau régional. D’ailleurs, la reconnaissance internationale et continentale s’est traduite par la désignation de Sa Majesté Mohammed VI Roi du Maroc en tant que leader de la migration en Afrique.

L’initiative royale a impulsé deux actions fortes qui ont consolidé la dimension continentale de la migration, en l’occurrence l’Observatoire Africain de la migration et l’Agenda africain de la migration.

Selon des officiels marocains, dans le cadre de la SNIA, plus de 50 000 ressortissants de pays africains frères et amis ont régularisé et ont vu leur situation administrative assainies. «Nous avons privilégié les personnes vulnérables et facilité la mobilité de travail, l’insertion professionnelle et le regroupement familial grâce à des critères d’éligibilité très souples et également grâce aux moyens de recours sous l’égide du CNDH.»

Les personnes régularisées ont bénéficié également d’un plan national d’intégration leur permettant d’accéder pleinement aux services sociaux, éducatifs, médicaux, économiques et ce, à l’instar des nationaux.

Cette politique ambitieuse d’intégration permet aujourd’hui à «nos frères ressortissants africains régulièrement établis d’être de véritables incubateurs de potentialités qui enrichissent la vitalité et la diversité de la société marocaine et nous sommes fiers de cette connectivité civilisationnelle qu’ils ancrent entre nos pays respectifs.»

Malheureusement, cette dimension noble et vertueuse de la migration est pervertie par les actions criminelles des réseaux de trafic qui exploitent la vulnérabilité des victimes et les poussent dans des aventures dangereuses et meurtrières.

Ces réseaux de trafic usent de stratagèmes d’une grande violence, notamment lors des assauts planifiés de façon quasi- militaire, avec des assaillants aux profils de miliciens et d’anciens militaires issus de pays déstabilisés par la guerre et les conflits.

Plus de 145 assauts ont été repoussés autour des présides de Sebta et Mellilia depuis 2016 (50 en 2021 et 12 jusqu’ à mai 2022).

Plusieurs éléments des forces de l’ordre, qui usent d’un usage proportionné de la riposte en légitime défense, sont blessés au cours de ces assauts.

«Et ce qui s’est passé le vendredi au niveau de Nador est un véritable drame que nous déplorons», relève une fois de plus Rabat.

Contre ces réseaux de trafic, les autorités marocaines mènent une lutte sans merci avec plus de 1300 réseaux démantelés les 5 dernières années (256 en 2021 et 100 jusqu’ à mai 2022).

De même, plus de 360 000 tentatives d’émigration irrégulière ont été avortées depuis 2017 (63 000 en 2021 et 26 000 jusqu’ à mai 2022).

La dimension humaniste de la gestion migratoire au Maroc se traduit également par les retours volontaires mis à disposition des migrants qui souhaitent retourner vers leurs pays d’origine dans le plein respect de leurs droits et dignité.

Depuis 2018, plus de 8100 ressortissants africains ont bénéficié de ces retours volontaires organisés et financés par le Ministère de l’Intérieur aussi bien par voie aérienne que terrestre.

Avec l’OIM, le programme de retour volontaire marche bien avec environ 2 400 personnes retournées en 2021 et plus de 1 100 en 2020.

Soucieux de conforter davantage la gestion humanisée des frontières, le Maroc a adopté en 2020, un référentiel de procédures standards pour un système d’orientation et de prise en charge des migrants secourus en Mer ou appréhendés au niveau des frontières.

Ce référentiel a pour objectif de séquencer le système de référencement régional et local comprenant l’accueil, l’orientation, le transfert et la prise en charge des migrants en fonction de leurs statuts (migrants économiques, demandeurs d’asile, victimes de traite.

L’environnement régional, le contexte post–covid, la guerre en Ukraine et la crise alimentaire qui se profile exacerbent le défi migratoire et nécessitent plus que jamais des actions concrètes en termes de solidarité agissante et d’appuis pluriels.

Sa Majesté le Roi Mohammed VI a toujours inscrit la coopération Sud-Sud en tant que levier majeur pour niveler les différentiels de développement et permettre de stabiliser les régions pourvoyeuses de migrants. Les actions concrètes de co-développement initiées par Sa Majesté le Roi dénotent cette vision solidaire.

Le Maroc est également prêt à coopérer pleinement avec ses amis et frères africains à travers l’échange d’expertise et la formation croisée.

Par ailleurs, les pays du Nord doivent privilégier un prisme équilibré dans leur approche qui ne doit pas être imprégnée du tout sécuritaire, mais   basée sur des solutions structurelles autour du développement durable des pays d’origine et de l’encouragement de la mobilité légale entre les deux rives.

Le Maroc prône une coopération sud-sud solidaire et agissante, qui place l’élément humain au centre des actions, des projets et des initiatives. Des milliers de Subsahariens vivent au Maroc, certains y étudient (plus de 12 000 étudiants via le canal de la coopération dont 90% sont boursiers du Royaume), d’autres y travaillent et ils sont tous pleinement intégrés.

Le Royaume a toujours plaidé pour une migration humaniste, globale, pragmatique et responsable, faisant du Maroc une terre d’accueil, ce qui a permis la régularisation des dizaines de milliers de Subsahariens depuis 2013 en les faisant bénéficier des mêmes services publics que les citoyens marocains.

Dans ce cadre, le Royaume du Maroc applique de manière ferme les engagements internationaux du Royaume en matière de migration et d’asile et en matière du respect des droits de l’homme.

Ces engagements internationaux en matière de Migration, se reflètent dans la mise en œuvre de la Stratégie nationale d’immigration et d’asile qui se veut une politique respectueuse de la dignité et des droits du migrant ainsi qu’une politique inclusive du migrant dans tous les services auxquels ont accès les nationaux (éducation, emploi, hébergement, santé, formation professionnel, …).

«Malheureusement, nous déplorons l’assaut d’une grande violence perpétré à Nador le vendredi 24 juin 2022. Il s’agit d’une opération conduite par des réseaux mafieux internationaux organisés qui se livrent au trafic d’être humain en faisant venir des migrants de l’extérieur du Maroc. Cet assaut, conduit par ces réseaux mafieux, a été d’une extrême dangerosité et violence. Ces réseaux mafieux sont prêts à tout au déni de la vie humaine des migrants.» Ce constat réitéré, le Royaume du Maroc réaffirme sa détermination à renforcer la coopération avec l’ensemble des partenaires dans le cadre de la responsabilité partagée pour une meilleure sécurité régionale.

Naturellement, le Royaume du Maroc reste engagé à renforcer l’ancrage de sa gouvernance migratoire humaniste et solidaire en matière de protection des migrants vulnérables et des victimes et à poursuivre son combat contre les réseaux de trafic des êtres humains, qui entachent la dimension noble de la migration.

Par Wakat Séra et Ambassade du Maroc à Madrid en Espagne