La Commission dite de Dialogue et de Réconciliation, crée en vue de trouver une solution à la grave crise qui secoue le Mali, a désormais un Président. Il s’agit de Mohamed Salia Sokona, ancien ministre et ancien diplomate.

En portant son choix sur cet homme, le Président de la République par intérim, Dioncounda Traoré, a été très inspiré. En effet, par ses qualités et son expérience, Sokona a suffisamment de «cartes en main» pour réussir sa mission. Mais il existe des préalables.

Le Président de la transition, Dioncounda Traoré, a nommé certains membres de la Commission Dialogue et Réconciliation, dont la mise en place est une recommandation de la communauté internationale, dans sa mobilisation autour du Mali.

Cette commission est dirigée par Mohamed Salia Sokona. Celui-ci préside une équipe de 33 personnes, issues de la société civile.

Le choix porté sur Sokona, quoique surprenant, (l’intéressé avait disparu de la scène publique, au niveau national) est judicieux

En effet, cet homme, pondéré et à l’entregent facile, connaît les rouages de l’Etat. Il a été ministre de la Défense, sous le Président Konaré. Ensuite, il a occupé le poste d’ambassadeur du Mali dans plusieurs pays, notamment en France.  Aussi, Mohamed Salia Sokona n’est pas connu par une quelconque coloration politique. C’est dire qu’il a suffisamment de qualités pour mener à bien cette mission de dialogue et de réconciliation, afin de sortir le pays de la crise.

Cependant, le chemin menant à cette réconciliation, par la voie du dialogue, est jonché d’obstacles, dont les plus gros se dressent à Bamako, non à l’intérieur du pays, où les populations vivent en symbiose.

 Dialogue avec qui ?

L’idée de la création de cette commission avait été lancée par le Président Traoré, après son traitement à Paris. Seulement voilà. De nombreuses questions demeurent à présent autour de la création, de l’objectif et des missions confiées à la commission. S’y ajoute que le Mali actuel, le coup d’Etat et l’occupation du nord ont sérieusement mis le pays en lambeau, tout en opposant les Maliens. En effet, au nord comme au sud, les Maliens ont vécu un enfer à cause des actes posés ça et là par des groupes et/ou groupuscules armés (militaires, rebelles ou terroristes).

Au nord, quel dialogue est-il possible aujourd’hui ? Avec qui dialoguer ? Ce sont là deux questions auxquelles il faut trouver des réponses.

A ce sujet, nombreux sont les Maliens à exclure d’emblée tout dialogue avec le Mnla. Ce groupe qui, même avant l’éclatement des hostilités au nord, en janvier 2012, avait opté pour la radicalisation. De novembre à janvier 2012, le Mnla avait rejeté les offres de dialogue de l’Etat malien. Parce que, ce qui importait pour ce mouvement, à l’époque, c’était l’option militaire.

Avec la nouvelle situation, tout indique que le schéma choisi par le Mnla avec ce qui se passe à Kidal, est d’amener les autorités maliennes à accepter l’ouverture de négociations autour de la question d’autonomie, à défaut de l’indépendance de…l’Azawad.

 Une chimère !       

A l’extérieur, l’Onu, sous la pression de lobbies touaregs, œuvre pour cela. C’est pourquoi la commission Dialogue et Réconciliation a toujours été parmi les recommandations de l’Onu aux autorités de Bamako. Cependant, il n’y a pas que le Mnla au nord du Mali.

En clair les autres communautés des régions (pas Kidal seule) n’accepteront pas d’être exclues du processus de dialogue. En effet, Peulhs, Songhaï, arabes, Soninké, Bambara, Dogons et Touaregs, doivent être tous là, pour mener tous ensemble, un dialogue véritable et  une vraie réconciliation.

 Bamako :

En outre, il n’y a pas que le nord à réconcilier. A Bamako, depuis le coup d’Etat, plusieurs actes (de folie) ont été posés contre les institutions, la République et contre de paisibles citoyens. Ces actes ont contribué à déchirer le tissu sociopolitique. Arrestations arbitraires, séquestrations, enlèvements, emprisonnements, règlements de comptes, ont été entre autres, le quotidien des Maliens, pendant douze longs mois. Une éternité !.

Dans ce climat d’occupation du nord et de terreur au sud (Bamako), le Mali s’est retrouvé plus divisé que jamais. Seuls quelques groupuscules d’opportunistes trouvaient leurs comptes dans cette anarchie installée dans le pays.

Aujourd’hui, l’équipe de Sokona a du pain sur la planche. Sa mission est des plus délicates, tant le fossé séparant les Maliens est tout aussi large que profond. S’y ajoutent que beaucoup d’intérêts se sont greffés à la crise. Malgré la libération des régions du nord, Bamako est loin de retrouver la sérénité indispensable à tout dialogue et à toute réconciliation. Or, la commission n’a pas beaucoup de temps devant lui. Alors, Sokona peut-il réussir à surmonter les obstacles et à réconcilier les Maliens de tous bords ? C’est là toute la question.

C.H. Sylla