Le lit du fleuve Niger, à Ségou, est un réservoir de sable et de gravier. Les clients se font rares. Naturellement, les prix le ressentent, le secteur aussi. Rencontre avec des acteurs dont l’apport est considérable à l’économie.

A Ségou, pour avoir le sable et le gravier enfouis au fond du fleuve de Farako à Kamalé, les jeunes plongeurs se lèvent tôt le matin. Torse nu, ils sont au début d’un maillon qui va des détaillants aux grossistes. Ces jeunes quittent leur village ou leur pays pour venir travailler à Ségou au bord du fleuve. Leur tâche est d’aller en pirogue, chercher sable et gravier. Aujourd’hui, le secteur connaît une mévente. Commerçants et plongeurs sont tous impactés. Des tas de sable qui deviennent des dunes obligent les vendeurs à brader les prix. Ainsi, ce qui était cédé à 35 000 F CFA, se négocie difficilement à 20 000 CFA. Le bord du fleuve, naguère lieu de travail, est devenu aujourd’hui un lieu de repos pour les plongeurs, vendeurs et chauffeurs de camions.

MAHAMADOU DJIRÉ, VENDEUR DE SABLE ET GRAVIER

35 ans de métier

« Notre travail c’est l’extraction et la vente du sable et du gravier. Je travaillais avec mon oncle. Je vis de ce travail, j’ai une femme et des enfants. Aujourd’hui, nous sommes confrontés à des difficultés. Le hic est que nous ne cessons d’encaisser les dettes envers ces jeunes qui quittent leur village pour travailler avec nous. Ils viennent pour chercher du sable et en retour on les paie. Nos produits sont stockés depuis plus de trois mois. Les acheteurs se font rares, pas de vente alors que les jeunes ont besoin de leur argent. Pour ne pas rester comme ça, ils ont décidé de nous livrer le sable à crédit. Donc nous achetons du gasoil et eux partent chercher du sable. C’est la situation du pays qui a rendu les choses comme ça. Car, si les clients ne viennent pas, cela va se ressentir sur notre activité. Nous voulons que les autorités réfléchissent sur notre situation. Souvent, je pars à la pêche pour ne pas rester immobile. Le prix normal du sable qui faisait 35 000 F CFA, connaît une réduction profonde jusqu’à 20 000 F CFA. Imaginez, déplacer la pirogue avec 20 litres d’essence, partir à Farako et Kamalé pour prendre du sable et venir vendre à un prix dérisoire de 20 000 F CFA. Nous prions pour que la stabilité revienne dans ce pays afin que nos produits puissent marcher ».

MAHMOUD DOUCOURÉ, VENDEUR DE SABLE ET GRAVIER, PROMOTEUR DE L’ENTREPRISE ROI 12-12

« Seul un mouvement d’ensemble permettra de construire ce pays »

« Aujourd’hui, notre activité est aux arrêts. Il n’y a rien qui marche. Les chauffeurs ainsi que les travailleurs passent toute la journée à causer sous l’arbre, faute d’activité. Notre secteur, ici à Ségou, n’est pas assez porteur. Si les autorités pouvaient améliorer ce secteur pour qu’il soit un peu valorisé, nous en serions fiers. La cause est l’instabilité. Ils sont nombreux dans ce secteur qui ne respecte pas les normes. Ils pensent qu’avoir une pirogue est suffisant pour être un exploitant de sable. Je suis moi-même contre ça. Construire une belle maison dépend du sable et du gravier, donc les autorités doivent prendre notre secteur à bras le corps. Seul un mouvement d’ensemble permettra de construire ce pays.

Nos autorités doivent porter un regard sur notre secteur. Par rapport à l’insécurité, nous n’avons aucun problème à ce niveau. Nos produits sont vendus partout au Mali même à l’extérieur. Cependant, nous payons nos impôts, alors que nous creusons nous-mêmes pour avoir du sable. A ce niveau, nous demandons au gouvernement de nous accompagner avec des matériels. La raison du nom Roi 12-12 parce que c’est un homme que j’ai beaucoup apprécié c’est pourquoi j’ai nommé mon entreprise à son nom. Même les camions portent son nom. J’ai eu l’occasion de le rencontrer lors de sa visite à Markala. Je l’apprécie seulement pour les actes de bonne foi qu’il a posés et aussi son comportement et non pour autres choses. Toutefois, je serai heureux de signer un partenariat avec lui ».

 

Ibrahima Ndiaye

(Depuis Ségou) 

Source: Mali Tribune