Deux sujets de préoccupation occupent aujourd’hui l’esprit des Maliens: la pandémie Covid-19 et les élections législatives. Le premier, bien que de dimension mondiale, est différemment appréhendé. Au double plan financier et technique, le Mali, comme la quasi-totalité des Etats africains, est lourdement handicapé, au point de faire figure de victime expiatoire.

 

Tout inventaire approfondi de nos capacités à faire face au fléau pousserait au désespoir. Et l’Etat, qui mesure mieux que quiconque nos handicaps en la matière, essaie de trouver les différentes parades possibles pour juguler les risques de psychose.

Jusqu’au bout, il entretiendra le flou autour de la situation réelle (à moins que des faits exceptionnellement graves ne l’obligent à la dévoiler). Comme un père, qui n’avoue jamais que contraint son impuissance à sa famille.

L’annonce précipitée par le Gouvernement de la mise en place de six milliards de francs CFA pour faire face aux charges de la lutte contre le Coronavirus participait davantage d’une riposte psychologique. D’autant qu’il est évident que, même si à ce moment notre pays était encore (officiellement) épargné par ce mal, qui n’avait alors que les manifestations d’une épidémie, ce montant était dérisoire pour acquérir seulement les rudiments techniques pour contrer l’invasion de la maladie.

L’effet d’annonce valait d’être recherché. Car, face à cette autre guerre asymétrique, à la fois sournoise et incisive, il est impérieux pour l’Etat d’élaborer un plan d’action et de se donner les moyens de l’exécuter.

Le gouvernement, déjà confronté à une trésorerie publique très sollicitée et passablement mise à mal, ne peut raisonnablement miser que sur l’option de la solidarité nationale.

Avec une grosse hypothèque à lever liée à la défiance profonde du Malien pour tout ce qui touche à la gestion de fonds de solidarité, dont les règles ne sont jamais clairement définies.

Pour une cause qui concerne leur devenir même, les Maliens vont-ils se départir de cette méfiance, somme toute objective, pour se fondre dans un mouvement forcément national ?

Mais l’argent, pour cette fois, n’est pas véritablement le nerf de la guerre. Ce rôle revient aux populations et à leur capacité à se mouler dans le carcan des mesures barrières.

Bamako, la capitale et, à ce titre, vitrine de la réaction du pays à ce défi planétaire, est vautrée dans un capharnaüm qui mêle insalubrité, pollution environnementale, sonore et visuelle, circulation routière aux allures de  »course à la mort » et cacophonie humaine provoquée par la quête effrénée du pain quotidien.

Comment, dans ces conditions, obtenir une quelconque discipline nécessaire à la bonne mise en œuvre d’un plan de protection contre le Covid19 ?

Faut-il pour autant désespérer de notre pays qui, comme les autres pays du Sahel, presque asphyxiés par la grosse pression djihado-terroriste, serait voué au chaos, si l’on en croit les prévisions pessimistes de l’ONU et de (déjà) pseudo-spécialistes d’un phénomène que l’humanité ne fait que découvrir ?

En plus d’une discipline rigoureuse de vie, notre conviction reste faite que le peuple malien renferme en son sein le savoir-faire nécessaire pour faire échec à ce nouveau fléau. Il suffit de replonger dans nos recettes médicinales traditionnelles.

Ceci n’est pas un appel au charlatanisme mais simplement à des pratiques thérapeutiques avérées.

Le second sujet de préoccupation de nos concitoyens pourrait paraitre presque dérisoire, après l’évocation du premier, s’il ne représentait un enjeu de poids pour l’émergence d’une société de bonne gouvernance que tous les Maliens appellent de tous leurs vœux, au vu du désastre dans lequel le presque septennat d’IBK est en train d’entrainer le pays.

Certes, la lente mais sûre progression du Covid-19 a beaucoup tempéré les ardeurs des populations à participer à un scrutin visant à remplacer un parlement devenu illégitime depuis deux ans. Mais elle n’a pas annihilé leur légitime préoccupation à voir le pays doté d’une institution dont le rôle reste capital pour le relèvement d’un système démocratique largement dévoyé par des manœuvres frauduleuses et de corruption. Dont la justice tente d’ailleurs péniblement de démêler l’écheveau.

La nouvelle tendance politicienne, qui consiste à mettre en œuvre tous les moyens douteux pour faire élire des hommes mis en cause dans des affaires de corruption et de détournement de deniers publics colossaux, en vue de les soustraire, par le biais de l’immunité parlementaire, à l’action judiciaire, ne saurait être de bon augure pour le déclenchement de l’action de rédemption de l’image parlementaire malienne.

Un très volontaire rebond est donc nécessaire au second tour des élections législatives pour favoriser l’arrivée au sein de l’hémicycle d’hommes nouveaux, propres de tout soupçon de faits justiciables et susceptibles d’apporter des idées novatrices de nos pratiques parlementaires.

Dans le premier comme dans le second cas (lutte contre le Covid-19 et élections législatives), le destin des Maliens est entre leurs mains.

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Source: l’Indépendant