Remis au président de la Transition le 11 octobre 2022, l’avant-projet de la nouvelle constitution du Mali ne cesse de susciter le débat. Un débat souvent inutilement passionné occultant l’essentiel : la nécessité d’une nouvelle constitution pour porter les idéaux du Mali Kura ! Le débat est tel qu’on se demande souvent si certains savent qu’il ne s’agit pour le moment que d’un avant projet soumis à l’appréciation des institutions de la République et des forces vives de la nation par la Commission de rédaction de la nouvelle Constitution (CRNC).

 

Le contenu est forcément matière à débattre. Mais, il faut un débat constructif, qui va donc au-delà des seuls intérêts d’une personne, d’une corporation…  Aujourd’hui, en quoi cela nous avance-t-il de remettre en cause la légitimité des Institutions de la Transition (le Président de la République et le Conseil national de transition) qui sont habilitées à adopter le projet définitif et à promulguer la nouvelle Constitution si les Maliens l’adoptent lors du referendum ?

C’est une transition qui est en cours, donc un Etat d’exception. Il faut surtout garder à l’esprit que la Constitution du 25 février 1992 est aussi issue d’une transition. Sans compter que depuis l’avènement de la démocratie, toutes «les institutions légitimes» ont tenté de réviser cette constitution sans y parvenir pour une raison ou une autre.

Il est aisé pour certains politiciens aujourd’hui d’être tentés de jeter l’avant-projet à la poubelle sous le fallacieux prétexte qu’il n’est pas conforme aux idéaux de la Révolution de Mars 1991. Mais, si nous en sommes là aujourd’hui, c’est parce que ces idéaux n’ont réellement pas survécu à la Révolution. En 30 ans de démocratie, ils n’ont jamais cessé d’être foulés aux pieds. Le hic, c’est que ce sont nos pseudos démocrates qui se sont le plus illustrés dans l’exercice de piétiner lesdits idéaux.

Si chacun de nous, notamment la classe politique, les avait réellement privilégié, c’est un autre pays que nous connaîtrions aujourd’hui. Et non cette démocratie aux antipodes du système politique pour lequel les Martyrs ont payé le prix fort. A cause de la mégalomanie et de la cupidité de nos démocrates, la démocratie a été purgée de toutes les valeurs qui lui auraient réellement permis d’être le socle du changement tant attendu par les Maliens.

Loin de nous toute volonté de faire croire que le document est nickel. Il a ses forces et ses faiblesses. Mais, cela ne me met pas en cause la crédibilité et l’objectivité du CNRC qui a consulté toutes les forces vives du pays afin de parvenir à un document plus consensuel. Et il est encore reparti à la rencontre de tous les acteurs pour écouter leurs critiques, leurs objections, leurs suggestions.

Autrement, chacun se voit offrir une seconde opportunité de se faire entendre pour que ses préoccupations soient prises en compte. Mais, il ne faut pas céder à la surenchère comme malheureusement certains acteurs politiques. Et comme le conseille si bien le jeune leader politique et brillant intellectuel qui n’hésite jamais à prendre position dans les débats engageant la vie de la nation, Cheick Boucadry Traoré, il faut faire preuve de «beaucoup de discernement avant de nous engager dans nos choix. Nous ne devons pas oublier que nos choix d’aujourd’hui auront inévitablement des conséquences sur notre futur».

Une constitution engage une nation sur plusieurs années voire sur plusieurs décennies. Autant alors que chacun y mette du sien pour que nous puissions avoir un projet à la hauteur de nos profondes aspirations et des grands défis auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui et que nous devons relever aussi dans les années à venir pour bâtir le Mali Kura !

Moussa Bolly

Source : Le Matin