Les communes de Kiffosso I, Ourikéla dans le cercle de Yorosso (Région de Sikasso) et de Nièna dans la région de Sikasso ont signé respectivement, les 8, 10 et 12 septembre 2020, une convention pour l’abandon de la pratique du mariage des enfants. Cette signature de convention dans la troisième région administrative du Mali entre dans le cadre du projet « le mariage n’est pas un jeu d’enfant » (MTBA) initié par l’Organisation non gouvernementale (ONG) Save The Children. A Nièna (Sikasso), la gestionnaire du Projet « le Mariage n’est pas un jeu d’enfant » au compte de l’ONG Save The Children basée à Sikasso, Mme Berthé Aïssata Traoré, a bien voulu nous accorder une interview dans laquelle elle invite tout le monde à s’engager afin que le mariage des enfants puisse cesser au Mali. «Nous interpellons tout un chacun pour que la pratique du mariage des enfants cesse dans nos communautés. Il faut que chacun s’engage. Le combat pour l’abandon de la pratique du mariage des enfants est un combat de longue haleine mais un combat noble qui va aider à renforcer et à assurer le développement de ce beau Mali, un combat qui va permettre à chaque fille du Mali d’étudier en toute sérénité et d’être économiquement et socialement viable pour ce pays. Engageos- nous tous pour qu’aucune fille ne soit plus victime de mariage avant l’âge », a-t-elle dit. Lisez !

Le Républicain : Plusieurs communes au Mali ont signé une convention pour l’abandon du mariage des enfants. Cette signature de convention entre dans le cadre du Projet « le Mariage n’est pas un jeu d’enfant ». Pouvez-vous nous parler un peu de ce projet ?

Mme Berthé Aïssata Traoré : Nous travaillons sur le Projet « le Mariage n’est pas un jeu d’enfant » qui est mis en œuvre par une alliance composée de Save The Children, de Oxfam, de Population Council et de SIMAVI. Donc une alliance de quatre organisations qui interviennent dans cinq pays dans le monde que sont le Mali, le Niger, le Malawi, l’Inde et le Pakistan. Ce projet est financé par le ministère des affaires étrangères des Pays-Bas pour une durée de cinq ans (2016 à 2020). Le projet à sept axes d’intervention. Le premier axe est sur l’information des jeunes sur les questions de santé sexuelle et reproductive, le deuxième axe est sur l’accès à l’éducation formelle pour les jeunes filles, le troisième axe est sur l’accès aux opportunités économiques pour les jeunes filles et jeunes femmes affectées ou exposées aux risques de mariage d’enfant, le quatrième axe est sur le mécanisme de protection communautaire, le cinquième axe est sur l’accès aux services de santé par les jeunes et les adolescents, le sixième axe est sur le changement de comportement, la mobilisation communautaire pour le changement de comportement et le septième axe est sur le plaidoyer. Actuellement nous travaillons dans 12 communes et villages des cercles de Yorosso et de Sikasso pour la mise en œuvre de ce projet au nom de Save The Children.

Pourquoi le choix de ces localités pour l’exécution du projet ?

Le choix est venu des communautés elles-mêmes, à travers leur engagement depuis le début du projet. Donc parmi les communes dans lesquelles nous œuvrons, sur les quatre ans, on a beaucoup travaillé avec les maires, avec les communautés. Des communautés ont déjà montré un engagement formel, indépendamment des mesures législatives prises par le Mali par rapport aux questions de mariage précoce, de  mariage des enfants, à savoir, au niveau communal, des conventions communales d’abandon de la pratique du mariage des enfants. Des conventions qui vont non seulement s’axer sur des pratiques qu’ils ne veulent plus du tout voir dans leur commune mais aussi, des possibilités de sanctions spécifiques par rapport à des cas de mariage selon les tranches d’âges. Les sanctions concernent trois catégories de personnes : celui qui donne son enfant en mariage, celui qui célèbre le mariage et celui qui consomme le mariage et ça concerne toutes les filles de moins de 16 ans parce que malheureusement la législation malienne est encore à 16 ans pour les filles. Le projet continue à faire des sensibilisations pour aller vers les 18 ans afin que la fille soit mature physiquement, émotionnellement pour pouvoir assumer son futur rôle de femme mariée. Ainsi, les deux localités de Yorosso qui ont été choisies font parties des quatre communes dans lesquelles nous travaillons. C’est un processus, nous sommes dans ce processus depuis février 2020 et actuellement nous avons six conventions communales qui ont été signées sur les 10 communes d’intervention. Le processus va continuer dans les autres communes d’intervention du projet aussi bien à Yorosso qu’à Sikasso.

Il y a sanction en cas de violation de la convention pour l’abandon du mariage des enfants, alors, le montant récolté sera dans quelle caisse et sera destiné à faire quoi concrètement ?

Dans le cadre de cette convention, des sanctions communales ont été prévues et il y a un comité de suivi communal qui a été mis en place. Les fonds qui seront récoltés par rapport aux sanctions seront utilisés par ce comité pour assurer le suivi ainsi que les actions de médiations sociales selon les différents cas. Le fonds sera logé au niveau de chaque mairie.

Quel est le message que vous avez à lancer ?

Le message spécifique que j’aurais à lancer c’est que l’ensemble des communes suivent l’exemple de Ourikéla et de Kiffosso (Yorosso). Nous sommes dans un pays où le changement de comportement est difficile et lent. Mais nous sommes convaincus que chaque communauté a le souci du développement et du bien-être des enfants. Nous sommes convaincus que dans aucune famille, on aimerait voir des filles victimes de mariage d’enfant, victimes des conséquences socio-sanitaires, économiques, éducatives. Nous interpellons tout un chacun pour que la pratique du mariage des enfants cesse dans nos communautés, il faut que chacun s’engage. Le combat pour l’abandon de la pratique du mariage des enfants est un combat de longue haleine mais un combat noble qui va aider à renforcer et à assurer le développement de ce beau Mali, un combat qui va permettre à chaque fille du Mali d’étudier en toute sérénité et d’être économiquement et socialement viable pour ce pays. Engageons nous tous pour qu’aucune fille ne soit plus victime de mariage avant l’âge.

Propos recueillis par Aguibou Sogodogo

Source: Journal le Républicain-Mali