Monsieur le Premier ministre,

Je vous ai reconduit dans vos fonctions de chef de gouvernement, le 11 juin dernier. Ce n’était là nulle complaisance, nulle faveur mais un choix dicté par le mérite : votre mérite. Vos compétences techniques sont avérées.
Votre loyauté également que j’ai eu loisir à vérifier pendant la quarantaine de jours où vous vous êtes tenu à mes côtés pour gérer la crise socio politique que le pays traverse. Enfin, vous avez un sens élevé de l’Etat et de l’éthique. Je n’ai aucun doute que vous vous assumerez en tant que coordinateur de l’action gouvernementale, chef de l’administration publique, chef de la majorité présidentielle, et qu’il plaise à Dieu, chef possible d’une majorité pour l’avancement et le progrès du Mali, le seul progrès du Mali. Cette majorité, vous savez combien je la souhaite, combien je l’ai voulue et la veux avant même qu’elle fasse partie des recommandations de la CEDEAO. Je continue d’y croire et d’y travailler. Vous aussi, je le sais et c’est mon devoir d’en témoigner. Un gouvernement d’union nationale en ce temps d’épreuves constituerait une solide garantie. Elle sera la vitrine du Mali rassemblé, réuni et remobilisé pour le seul combat qui vaille : celui pour la sécurité et l’intégrité du territoire, celui pour le bien-être du peuple, celui enfin pour un avenir serein pour l’écrasante majorité de la population, à savoir la jeunesse, dont vous savez combien elle m’est chère, l’avenir du pays.

Monsieur le Premier ministre, Messieurs les ministres,

L’Exécutif mis en place le 27 juillet 2020, et ce, en droite ligne des recommandations du sommet de la CEDEAO tenu le même jour, est dictées par les circonstances que nous connaissons depuis le 5 juin dernier. Il est un Exécutif 2 restreint certes. Mais il doit, de manière volontariste et dans la plus grande solidarité :

– Premièrement, travailler au retour de la normalité, de la concorde et de la paix sociale et créer, ce faisant, les conditions propices à la formation d’un gouvernement d’union nationale ;

– Deuxièmement, diligenter une enquête minutieuse et crédible sur les pertes en vies humaines ainsi que sur les atteintes aux biens publics et privés tant à Bamako les 10, 11 et 12 juillet que précédemment lors des manifestations qui ont eu lieu à Kayes et Sikasso notamment. Toutes les responsabilités devront être situées pour que des mesures soient prises et des sanctions efficaces sur la base du droit.

– Troisièmement, accélérer l’opérationnalisation des mécanismes de suivi de la mise en œuvre des recommandations du Dialogue National Inclusif.

– Quatrièmement, étudier les voies et moyens de la mise en place d’un fonds d’indemnisation des victimes desdites manifestations ou de leurs ayant droit.

– Cinquièmement, mobiliser toutes les énergies et les ressources requises pour l’application immédiate et complète de l’article 39, en dépit du coût financier que nous savons particulièrement important pour la mise en œuvre de cette mesure, une mesure que nous ne pouvions cependant différer, dans l’intérêt de nos enfants.

Ce gouvernement ne connaîtra donc aucun répit. Il n’en connaitra aucun.

En plus des départements régaliens qu’il vous incombe d’animer, Monsieur le Premier ministre, messieurs les ministres, vous devrez surveiller l’évolution globale du pays et en rendre compte. En particulier, il vous incombera de vous pencher de toute urgence sur deux aspects des plus stratégiques. Il s’agit des contingences de la saison agricole et des complexités de la pandémie du corona virus. Tous les crédits nécessaires pour une bonne campagne agricole devront être libérés. S’agissant de la COVID-19, il est important qu’en attendant la mise en place d’un gouvernement complet, notre pays qui, Dieu en soit loué, aura été relativement épargné car bien moins affecté que d’autres, il serait souhaitable qu’il ne subisse pas à son tour les ravages d’une deuxième vague de contamination. Faites donc en sorte que la lutte contre la Pandémie soit maintenue voire intensifiée, car notre seul salut réside dans la prévention. Intensifier l’appel au port des masques qui préviennent et qui protègent.

Monsieur le Premier ministre, Messieurs les membres du gouvernement,

La recette, pour accomplir la mission ardue qui est la vôtre, sera de savoir rester humble, de garder vos portes ouvertes et vos mains tendues. Je vous en sais capable les uns et les autres. Faites en sorte que les compétences existant tant dans la majorité que dans l’opposition et la société civile puissent venir vous aider à conforter la marche du Mali. Nous sommes tous fils de ce pays, tous en soucis de ce pays, tous à la stabilité de ce pays. Cela sera à votre honneur, à notre honneur, et au seul bénéfice du grand pays que nous sommes.

Je souhaite être le président d’un Mali dont les enfants se redonnent la main. Car c’est ma conviction profonde que, malgré les incompréhensions et les malentendus, nous n’avons pas le choix, nous sommes appelés à rester ensemble. Notre destin est solidaire. Notre salut n’est pas dans les barricades. Il est dans notre complicité. Nul ne se sauvera sans les autres. Nous nous sauverons ensemble. Qu’à Dieu ne plaise nous périrons ensemble. Inchallah nous survivrons et de la plus belle façon.

Il est dans notre capacité à entendre les cris et les plaintes, et à répondre à une demande sociale forte.
Je vous y engage, Monsieur le Premier ministre.

En même temps, je sais que la loi et l’ordre doivent prévaloir. Il est impossible de transiger là-dessus. Ce sont là les prescriptions et les préalables de l’Etat de droit que nous ambitionnons de construire. Ces prescriptions ne sont pas l’ennemi du dialogue et du rassemblement auxquels j’appelle notre peuple. Ma rencontre avec le Conseil supérieur de la magistrature m’a rassuré quant au dire du droit dans notre pays, à la qualité de dire le droit dans notre pays. Les magistrats maliens m’ont rassuré. J’ai vu des hommes et femmes de qualité, soucieux du droit et son effectivité au service du peuple malien. Je comprendrais également que la recherche du consensus ne doit pas se faire au détriment des urgences et de la norme. Car il y a un peuple à servir et de pressants défis à relever, il est important de fixer des délais et des garde-fou.

En tant que président de tous les Maliens, j’aimerai vous redonner ici l’assurance que je tenterai, tout ce qui est dans mon pouvoir, pour apporter aux brûlants dossiers du pays les solutions idoines.

Bonne chance Monsieur le Premier ministre et à votre équipe,

Qu’Allah bénisse le Mali !