Des experts militaires français ont examiné la situation de guerre qui se déroule au nord du Mali plus précisément dans l’Adrar des Ifoghas, dans la région de Kidal. Selon eux, les jihadistes qui voudront prendre la fuite pourront le faire car le nombre de soldats français et tchadiens qui sont sur place ne sont pas assez nombreux pour former une colonne étanche empêchant toute fuite. Néanmoins, ces experts affirment qu’une autre catégorie de jihadistes, beaucoup plus aguerris et fanatisés vont rester et se battront jusqu’au bout. massifs des ifoghas kidal

L’Adrar des Ifoghas, massif montagneux et rocailleux, constitué de multiples grottes souterraines est l’endroit idéal pour les jihadistes pour mener une guerre contre un ennemi dont la puissance de feu leur est largement supérieure. Ils sont quelques dizaines ou quelques centaines à être assiégés depuis plus de trois semaines par 1200 soldats français et 800 soldats tchadiens guidés par une vingtaine d’éléments d’El Hajj Gamou qui connaissent très bien le terrain. S’étendant sur un secteur de 25 km sur 25, il est très difficile pour ses différentes troupes de sécuriser entièrement la zone. Selon un ancien chef d’un service français de renseignement, « il est évident que certains d’entre eux pourront s’exfiltrer». « Ils connaissent tellement bien le coin. Souvenez-vous d’Al-Qaïda dans les environs de Tora Bora (Afghanistan) : ils étaient encerclés et bombardés et une bonne partie a réussi à disparaître ».

L’ancien chef insiste aussi sur le fait que les jihadistes connaissent le moindre recoin de la région : « Il est très difficile de quadriller une zone, si petite soit-elle. Et on n’a pas assez d’hommes sur le terrain. Les ennemis connaissent par cœur le moindre caillou, certains sont basés là depuis des années. Ils ont des relations anciennes avec les tribus touaregs des environs, qui pourront éventuellement les aider. Ceux qui voudront vraiment s’enfuir s’enfuiront. Ne vont rester que ceux qui ont la volonté de se battre jusqu’à la mort ».

Pour pallier leur manque d’effectif qui ne leur permet pas de former un mur humain infranchissable, les membres de l’opération Serval mise sur leur supériorité aérienne. En plus d’avions équipés d’infrarouge, l’armée française peut compter sur des images transmises par l’armée américaine grâce à des drones et des avions d’espionnage déjà présents dans la zone. Ces appareils permettent, surtout la nuit, de repérer hommes et véhicules qui se déplacent grâce à leur signature thermique. Les jihadistes ont appris à contrer cette surveillance et tentent de diminuer leur signature thermique en progressant en très petits groupes là où c’est possible, à l’abri de la végétation, ou en recouvrant le capot de leurs Toyota de linges mouillés.

La nécessité d’avoir plus d’hommes sur le terrain

Le fait que les appareils d’espionnage ne sont pas mobilisés 24/24 laissent aux jihadistes un moment pour fuir. Le général Henri Poncet, ex-commandant des opérations spéciales de l’armée française pense que la seule solution, c’est d’avoir plus d’hommes engagés. Face à un ennemi aguerri et retranché ayant eu le temps nécessaire de constituer ses lignes de défenses, «le ratio est qu’il faut engager six à sept attaquants pour un défenseur ». « Et dans ce cas, bien malin celui qui est capable de dire combien ils sont, donc si nous avons assez d’hommes sur zone», ajoute-t-il.

Pour Pascal Le Pautremat, spécialiste des questions de défense, « quel que soit le dispositif en place, même avec davantage d’hommes et de moyens, il y a toujours des gens qui réussissent à passer. Certains ont réussi à fuir le ghetto de Varsovie. Sur un terrain pareil, il faut avancer par damiers : conquérir une zone, la sécuriser, puis la tenir, faute de quoi l’ennemi peut revenir. Mais pour cela, il faut des hommes. Les Ifoghas, c’est plus de 200 000 km2. L’opération qui a été menée est une victoire tactique pour une zone déterminée, mais après, il y a tout le reste ».

Ahmed M.THIAM 

SOURCE: Le 26 Mars