Au Mali, il n’y a qu’une seule femme candidate à la présidentielle de dimanche prochain. Mais Haïdara Aïchata Cissé, candidate de l’Alliance Chato, est une battante. A 54 ans, c’est une militante syndicale et une femme politique expérimentée. Depuis six ans, elle est députée de Bourem, une localité proche de Gao, dans le nord du Mali. « Chato », comme on l’appelle au Mali, répond aux questions de RFI.haidara aichata cisse chato pdes presidentielle candidate

RFI: Etre une candidate femme, c’est un atout ou un handicap au Mali ?

Haïdara Aïchata Cissé: Dans le contexte du Mali actuel, c’est un atout parce que chaque fois que j’ai fait une conférence ou bien un meeting, j’ai fait salle comble donc je suis très heureuse de constater que les Maliens ne sont pas du tout opposés à ce qu’une femme soit présidente de la République.

Vous êtes la seule femme candidate. Est-ce que cela ne vous donne pas une visibilité encore plus grande ?

Je suis un peu triste d’être toute seule. Ça veut dire que les femmes ne sont pas très engagées en politique. J’exhorte mes sœurs désormais à briguer la magistrature suprême et à briguer d’autres postes de responsabilités parce qu’être femme est un atout.

Qu’est-ce qu’une femme peut apporter de plus ?

La femme est mieux placée pour le dialogue. On a besoin aujourd’hui, dans le contexte actuel du Mali, d’avoir une femme. Les femmes peuvent créer les conditions de paix.

Au-delà du fait que vous êtes une femme, qu’est-ce qui fait votre différence ?

La différence, c’est que je suis très courageuse, j’ai vraiment un courage politique hors pair.

Et vous êtes une ancienne syndicaliste d’Air Afrique…

Tout à fait. Air Afrique a été liquidé. Il y a 11 pays [concernés]. Le Mali est le seul pays qui a indemnisé le personnel à 100% et qui les a reversés dans la nouvelle société.

Grâce à votre combat ?

Grâce à mon combat. Quand je veux quelque chose, en général, je l’obtiens.

Est-ce que vous ne craignez pas que certains Maliens se disent, « Aichata on l’aime bien mais elle n’a pas l’expérience, ni le savoir-faire des poids lourds » ?

Non pas du tout, au contraire. J’ai bien montré que j’ai l’expérience parce que je suis syndicaliste depuis plus de 20 ans. J’ai été chef de service à Air Afrique pendant 18 ans. Je gère trois sociétés depuis une quinzaine d’années. Je suis députée élue. Je suis une politique.

Depuis plusieurs années, vous êtes au Parti pour le développement économique et social (PDES), le parti d’Amadou Toumani Touré (ATT), mais vous n’êtes pas investie par votre propre parti qui préfère soutenir le candidat Soumaila Cissé. Est-ce que ce n’est pas mauvais signe pour vous ?

Pas du tout, pas pour moi. C’est plutôt pour le parti politique. Ça veut dire que le parti a un problème. Le PDES n’a pas voulu me retenir comme candidate, et je me suis présentée comme indépendante parce que ma candidature a été suscitée par 187 associations de jeunes et par toutes les ONG de femmes. Moi, je suis la candidate du peuple.

S’il y a un deuxième tour, avec qui pourriez-vous faire alliance ?

Je préfère ne pas parler du deuxième tour, je préfère dire que je vais peut-être passer au premier tour. Pourquoi pas ? Et si je ne passais pas au premier tour, je verrais le candidat qui va porter mon projet de société pour le Mali. Et je voterai pour ce candidat.

Quelle est la plus belle surprise que vous ayez eue depuis cette campagne ?

C’était hier soir, quand je suis allée au Ghana. Je suis arrivée là-bas à une heure du matin et il y avait plus de 14 000 personnes qui étaient là, qui m’attendaient et qui scandaient « Chato, présidente ».

« Chato », c’est votre petit nom, le petit nom d’Aïchata ?

Voilà, c’est affectif. C’est ma grand-mère qui m’appelait Chato.

Par Christophe Boisbouvier

Source: RFI