Le passage tant scruté du chef de la délégation malienne sur la tribune onusienne continue de défrayer la chronique et d’alimenter les discussions, tant elle étonne par son caractère atypique. Intervenue dans un contexte d’adversité et de bruyante passe d’armes son soldées avec la France, depuis une année, l’intervention du Premier ministre par intérim, Abdoulaye Maïga, a vraisemblablement voulu rééditer le malaise provoqué par son prédécesseur à la même place.

 

Le tollé est peut-être réussi, mais la consistance, la teneur et le niveau du langage laissent manifestement à désirer pour un message destiné à la consommation universelle. Et pour cause, l’accessoire l’aura largement emporté sur l’essentiel et les préoccupations collectives reléguées au profit de règlement des comptes individuelles sur fond de tirs croisés dans une abondance plutôt ennuyeuse par moment. Ils ont notamment ciblé en premier lieu le président en exercice de la CEDEAO, Umaru Emballo Sissoko de Guinée Bissau, pris à partie pour sa prise de position en faveur d’une libération des 46 soldats ivoiriens, avant même que l’organisation sous-régionale ne tranche dans le même sens.

C’est pour les mêmes peccadilles que le président nigérien a mérité à son tour d’être déchu de sa nationalité par le chef du Gouvernement par intérim du Mali, tandis que son homologue de la Côte d’Ivoire était indexé sur la gênante question de son troisième mandat à la tête de son pays. Et dire que l’hostilité avec les trois chefs d’Etat a également déteint sur les rapports avec la CEDEAO dont une délégation, attendue à Bamako dans le cadre d’un dénouement de la crise des ivoiro-malienne, a vu son calendrier de visite unilatéralement ajourné pour contrainte d’agenda.  Comme on s’y attendait la France n’a pas été épargnée sur la tribune onusienne.

Mais, pendant que l’opinion et le monde entier attendait des éléments de preuves plus détaillés sur les accusations portées par le Mali devant le Conseil de sécurité, le public n’en saura pas plus que les mêmes affirmations superficielles de complicité entre Paris et les djihadistes que les forces françaises dotent d’armements et d’informations pour combattre l’armée malienne. Le public aura été en revanche bien servi en diatribes et persiflages hostiles à France dont les dirigeants ont mérite à leur tour le qualificatif d’une junte obscurantiste indigne des valeurs qu’incarnent les philosophes français des Lumières. Quant aux preuves de collusion avec les terroristes, le chef de la délégation a laissé entendre qu’il l’es réserve au Conseil de sécurité de l’ONU au niveau  duquel aucune suite n’a été donnée à la plainte des autorités maliennes ainsi qu’à leur demande d’être entendu sur la question.

Par-delà la France et les autorités chef d’Etat de la CEDEAO, le cercle des hostilités s’est élargi au Secrétaire général de l’ONU en personne pour son indélicatesse d’avoir osé opiner sur le statut des 46 militaires ivoiriens qu’il a qualifiés de non-mercenaires.  Les autorités maliennes, par la voix de Premier ministre par intérim et porte-parole du Gouvernement, estiment en effet qu’il outrepasse ses prérogatives et jugent inconcevable qu’il tranche une affaire pendante devant la justice malienne.

La tribune exceptionnelle de l’ONU a été ainsi exploitée en deçà des profits que pouvait en tirer un pays assailli par d’innombrables défis existentiels relégués au nom de détails sur les 46 soldats ivoiriens détenus et des comptes non soldés de la rupture avec la France.

A KEÏTA

Source : Le Témoin