L’affaire concernant ministère public contre Issa Tangara, Amadou Haya Sanogo et plusieurs autres accusés d’« enlèvement de personne, d’assassinat et complicité d’assassinat », communément appelée l’affaire des 21 bérets rouges, était inscrite au rôle d’audience de la Cour d’assises de Bamako, hier, jeudi 11 mars 2021. Au cours de ce procès, le parquet général aussi bien que les avocats de la défense ont demandé à la cour l’application de la loi d’entente nationale adoptée par l’Assemblée nationale du Mali en 2019 qui « prévoit l’extinction de toutes les poursuites pour toutes les personnes qui répondent à certains nombres de critères ». Ayant eu gain de cause à travers un protocole d’accord avec le gouvernement, les avocats des parties civiles se sont désistés et se sont retirés de la salle d’audience. Après avoir écouté les parties, la cour a décidé de mettre l’affaire en délibéré le lundi 15 mars 2021.

 

Hier, dans la matinée, la salle d’audience de la Cour d’appel de Bamako était pleine à craquer. Et pour cause, une affaire commencée depuis 2016 à Sikasso se poursuivait. Il s’agit de l’affaire concernant ministère public contre Issa Tangara, Amadou Haya Sanogo et plusieurs autres accusés d’« enlèvement de personne, d’assassinat et complicité d’assassinat », communément appelée l’affaire des 21 bérets rouges. Pour la circonstance, tous les accusés étaient à la barre. Le tribunal était sous haute surveillance, les forces de défense et de sécurité étaient aux aguets et un peu partout. Le procès proprement dit a démarré par la lecture d’un long arrêt de renvoi de 19 pages par la greffière audiencière. Puis, les avocats de la défense, dont Me Cheick Oumar Konaré et Me Mamadou Camara, ont soulevé des exceptions. Selon eux, il y a une loi d’entente nationale adoptée en 2019 par l’assemblée nationale du Mali et qu’il est nécessaire de l’appliquer dans ce dossier. Le procureur général qui est la partie principale poursuivante dans cette affaire a requis l’application de cette loi d’entente nationale. Cependant, au cours de l’audience, il y a une Dame Soumaré qui s’est présentée comme étant une partie civile et s’est opposée à l’application de la loi d’entente dans cette affaire. Selon Me Cheick Oumar Konaré, un des avocats de la défense, la dame Soumaré ne peut pas figurer pas ce procès. « Pour figurer dans ce procès, il faut avoir été entendu depuis l’enquête préliminaire jusqu’au niveau du juge d’instruction, jusqu’au niveau de la chambre d’accusation. En aucune de ces étapes, la dame Soumaré n’a été entendue, par conséquent, elle ne peut pas figurer dans ce dossier », a-t-il dit. Or, des parties civiles ont, à travers leurs avocats, déposé dans le dossier, un document portant protocole d’accord signé entre elles et le gouvernement du Mali. «Au terme de ce protocole d’accord, les parties civiles ont reçu une indemnisation financière. En vertu de ce protocole d’accord, les parties civiles se sont désistées de leur constitution de partie civile dans le dossier. Ce qui signifie qu’elles ne demandent plus rien. Et si les parties civiles ne demandent plus rien, cela allège la charge passionnelle voire juridique du dossier. C’est ainsi que le procureur général, suivant en cela les avocats de la défense, a décidé de requérir l’abandon de toutes les poursuites contre les accusés sur le fondement de la loi d’entente nationale. Il s’agit d’une loi qui prévoit l’extinction de toutes les poursuites pour toutes les personnes qui répondent à certains nombres de critères et nos clients répondent à ces critères. Que ce soient des crimes ou des délits pourvu que ces crimes et ces délits aient été commis dans le cadre des événements de 2012 », a souligné Me Cheick Oumar Konaré. Voyant que le procureur général aussi bien que les avocats de la défense ont demandé l’application de la loi d’entente nationale, la Cour a décidé de suspendre l’audience. Elle (la Cour) a mis l’affaire en délibéré le 15 mars 2021. Va-t-elle accepter l’application de cette loi d’entente nationale dans cette affaire ? L’avenir nous le dira. «L’indemnisation qui a été accordée par l’Etat aux parties civiles vise expressément cette loi d’entente nationale, donc il n’y a aucune raison qu’elle ne s’applique pas aux accusés », explique Me Cheick Oumar Konaré dans une interview accordée à la presse, tout juste après la suspension de l’audience. Pour la suite du procès, Me Konaré s’est dit confiant. «A un moment ou à un autre, un pays a besoin de se réconcilier. Les fils d’un pays ont besoin de se réconcilier et de se parler. Ce qui profite aujourd’hui pour Sanogo ou autres, va demain profiter à d’autres parce qu’il y a d’autres affaires qui impliquent des militaires, des rebelles, des terroristes. Donc, si vous voulez panser les plaies de la nation, il va falloir accorder le pardon national à ceux qui sont poursuivis », a conclu Me Cheick Oumar Konaré

A rappeler que le mardi 28 janvier 2020, la Chambre d’Accusation de la Cour d’Appel de Bamako avait ordonné la mise en liberté provisoire de Amadou Haya Sanogo, l’ex- chef de la junte et ses co-accusés. Emprisonnés il y a de cela 7 ans, ils étaient au nombre de 13 personnes à bénéficier de cette liberté provisoire. « La Chambre d’accusation de la Cour d’Appel de Bamako reçoit la demande de mise en liberté provisoire formulée par Issa Tangara et 12 autres ; la déclarant bien fondée ; en conséquence ordonnons leurs mises en liberté s’ils ne sont détenus pour autre cause », c’était le verdict prononcé par la Chambre d’accusation de la Cour d’Appel de Bamako en janvier 2020.

Suspendue à Sikasso, le jeudi 8 décembre 2016, pour cause d’irrégularité du rapport d’expertise effectué sur le corps des 21 bérets rouges, l’affaire concernant ministère public contre Issa Tangara, Amadou Haya Sanogo et plusieurs autres accusés d’«enlèvement de personne, d’assassinat et complicité d’assassinat », devrait être jugée, le lundi 13 janvier 2020 au Palais de la culture Amadou Hampâté Ba de Bamako. Mais, par la suite, le Procureur Général près la Cour d’Appel de Bamako, Idrissa Arizo Maïga, a informé l’opinion, dans un communiqué rendu public le 09 janvier 2020, qu’en raison des contraintes majeures liées à la préservation de l’ordre public et de la cohésion au sein des Forces Armées mobilisées pour la défense de la patrie, le procès de l’affaire «Ministère Public contre Fousseyni Diarra et autres communément appelé affaire Amadou Aya SANOGO », prévu pour le 13 janvier 2020, est reporté à une prochaine session de la Cour d’Assises de Bamako. Redémarrée ce 11 mars 2021, l’affaire est mise en délibéré le 15 mars prochain.

Aguibou Sogodogo

Source : Le Républicain