“Si Habib Sylla était dans un pays normal, il devait être en prison …. Et je ne peux travailler avec un Gabonais…”

Dans cet entretien exclusif, le président du Conseil supérieur de la diaspora malienne (Csdm) Mohamed Chérif Haïdara évoque plusieurs sujets, notamment ses relations avec le ministre des Maliens de l’Extérieur, Amadou Koïta et le président du Haut conseil des Maliens de l’Extérieur, Habib Sylla. D’après Mohamed Chérif,  certains Maliens sont prêts aujourd’hui à assigner Habib Sylla devant les tribunaux de Bamako et de la France dans une affaire de 700 titres fonciers vendus.

Aujourd’hui-Mali : Comment se porte le Conseil supérieur de la diaspora malienne ?

Mohamed Chérif Haïdara : Le Conseil supérieur de la diaspora malienne (Csdm) se porte aujourd’hui très bien. Nous sommes présents dans 48 pays. En 4 ans, nous avons pu installer le Csdm fédéral. En 4 ans, nous avons participé à tout ce qu’a fait l’Etat, notamment la révision constitutionnelle. Nous avons aussi participé à faire renoncer l’application du code de la famille.

Nous sommes intervenus tout comme le Haut conseil des Maliens de l’extérieur entre l’Opposition et le président de la République quand l’opposition avait refusé de reconnaitre IBK, après son élection.

Nous avons demandé le report des élections législatives. Nous avons aussi participé à trouver un accord politique pour la gouvernance qui a abouti au gouvernement de Boubou Cissé. Nous prenons part également, avec le Haut Conseil des Maliens de l’extérieur, au dialogue politique engagé par ce gouvernement.

Pour moi, c’est d’avoir réussi là où les autres ont échoué et la réussite est palpable. Depuis la conférence nationale quand les Maliens ont émis le souhait de faire participer d’une façon inclusive les Maliens établis à l’extérieur. Une association a vu le jour, qui est censée réunir tous les Maliens établis à l’extérieur qu’on a dénommé Haut conseil des Maliens de l’extérieur qui n’a connu que trois présidents. Le premier président fut  feu Sandiakou Sidibé du Gabon et le deuxième a été Abdrahamane Chérif Haïdara. Ils ont eu le récépissé en 1993.

Au début l’objectif du Haut conseil des Maliens de l’extérieur (Hcme) était de réunir tous les Maliens établis à l’extérieur qui se reconnaissent dans cette structure, mais nous ne sommes pas d’accord sur l’appellation car pour nous il n’y a pas de Maliens de l’extérieur, mais des Maliens établis à l’extérieur.

Heureusement que le gouvernement a rapidement compris qu’ils sont en train de créer un monstre. A l’époque, les Maliens établis à l’extérieur ont demandé à avoir des représentations à tous les niveaux y compris à l’Assemblée nationale, mais ils se sont rendu compte que non seulement le contexte à l’époque était difficile, mais la Constitution ne mentionnait pas la participation de Maliens établis à l’extérieur en tant que députés à l’Assemblée nationale. D’ailleurs, on mentionne les Maliens établis à l’extérieur dans un seul article, notamment l’article 110.

C’est l’article 105 qui stipule que “le Malien a la liberté d’appartenir à une association de son choix et la multiplicité des partis politiques”.

De 1993 à 2015, le gouvernent à compris l’importance des Maliens établis à l’extérieur. Tous les projets que Abdrahamane Chérif Haïdara avaient initiés n’ont pas vu le jour à part quelques projets de logements qui se sont terminés par un fiasco parce qu’il y a plus de 700 Maliens qui avaient payé de l’argent, mais qui n’ont pas obtenu les terrains achetés. Aussi l’arrivée de Habib Sylla n’a pas changé grand-chose. Elle n’a rien changé d’ailleurs.

Je n’ai jamais été membre du Haut conseil des Maliens de l’extérieur (Hcme). C’est grâce à Abdrahamane que je l’ai approché par ce que des amis proches de lui m’ont fait part de ses difficultés à l’époque et je me suis dit, en tant que Malien et qui vit aussi en Guinée, qu’il est important qu’on se donne la main pour l’assister dans la gestion de cette situation douloureuse que le gouvernement lui avait imposée. Ils se disent qu’un Malien sur trois vit à l’extérieur.

Nous apportons beaucoup à nos familles restées au pays et nous sommes des électeurs potentiels et qu’on peut faire voter nos parents. Si nous sommes recensés d’une manière efficiente, ce sont les Maliens de la Côte d’Ivoire qui vont élire le président de la République du Mali parce quelqu’un Malien sur deux vit en Côte d’Ivoire actuellement. Il n’y a jamais eu de recensement de Maliens établis à l’extérieur.

Après un bicéphalisme dans 17 pays avec des personnes voulues par les Maliens résident dans ces pays et des personnes imposées par le Haut conseil des Maliens de l’extérieur, on pensait que le Ministère des Maliens de l’extérieur était dédié aux Maliens résidant à l’extérieur, mais ce département ne sert que des associations. Il est là que pour gérer les Maliens de l’extérieur pendant les périodes électorales et ils ont transformé le Haut conseil en association d’accompagnement électoral.

Quelle est la situation des Maliens établis à l’extérieur ? 

Aujourd’hui, les Maliens établis à l’extérieur sont estimés à 6 millions de personnes. Malheureusement aussi, le gouvernement n’a pas voulu faire un véritable recensement. Ils ont peur de savoir combien nous sommes. Sur la liste électorale qui a réélu le président IBK, c’est environ 8 600 000 personnes.

Si aujourd’hui tous les Maliens établis à l’extérieur votaient pour un candidat, il allait passer. Ils ont trouvé des excuses comme quoi beaucoup ont la double nationalité. On pouvait avoir 2 800 000 Maliens qui pouvaient avoir leur carte d’électeur. Ils ont refusé de compter les Maliens. Nous sommes même arrivés à avoir une ONG pour financer le recensement des Maliens de l’extérieur, mais le gouvernement a refusé. C’est qu’ils ont peur de savoir combien nous sommes.

Ce qu’il faut savoir, c’est que les Maliens établis à l’extérieur supportent très mal certaines situations. Nous avons eu à constater un comportement qui n’honore pas les Maliens. Nous avons des pays avec lesquels nous avons signé des accords depuis les indépendances. Il y a la réciprocité dans les relations diplomatiques. Même notre accord de paix on lui colle un autre nom “Accord d’Alger”. C’est un accord de Bamako issu du processus d’Alger. Cette même Algérie qui arrête, maltraite et expulse des Maliens et c’est le Csdm qui a porté plainte contre l’Algérie à la CPI jusqu’à ce que l’Ambassade de l’Algérie soit venue demander pardon. Le gouvernement aurait pu faire plus.

Nous avons aussi des compatriotes qui souffrent en Angola, en Guinée Equatoriale. Il y a également des Maliens dont on a exproprié leurs biens à l’image du vice-président du Csdm au Congo Brazza. Ses biens d’une valeur d’environ 250 milliards de Fcfa et le gouvernement malien n’a rien fait.

C’est pour vous dire que le gouvernement refuse d’aider la diaspora à obtenir des cartes de séjour et ces gens ont finis par être expulsés. Nous allons tout faire pour interpeller le gouvernement malien sur les conditions de la diaspora malienne.

Vous avez récemment fait une prise position lors de la manifestation des jeunes de Kayes. Peut-on savoir pourquoi ?

Vous savez, beaucoup d’immigrés maliens sont issus de la région de Kayes et 60% des membres du Conseil supérieur de la diaspora malienne viennent de cette région. Le nombre de Maliens établis à l’extérieur est estimé à plus de 6 millions et nous apportons plus de 15% de PIB à l’économie malienne avec environ 800 milliards de Fcfa par an. Ce qui dépasse largement l’aide au développement de tous les partenaires du Mali. Les 80% vont dans les familles et les 20% vont dans les investissements.

La particularité de la ville de Kayes, c’est que  toutes les infrastructures de base comme les routes, les ponts entre villages, les écoles, entre autres, sont construits par la diaspora. Avec tout ça, l’Etat devrait reconnaitre les efforts des ressortissants de la région de Kayes car ils contribuent au développement du pays.

La route nationale N°1 traverse la région de Kayes. Si cette route est bloquée, l’Etat malien va perdre 2,5 milliards Fcfa par jour. Elle représente plus de 18% du budget national. Le Mali est le 3e pays producteur d’or en Afrique grâce à la région de Kayes. Et 70% de ces mines sont dans la région  de Kayes et l’ensemble de taxes payées pour les sociétés minières représente 22% du budget national.

Vous avez un aéroport qui  a été  construit à coup de milliards de nos francs avec l’argent du contribuable. Cet aéroport a été fermé sous prétexte que c’est une zone rouge. Ils ont les moyens d’aller à Kidal, Gao, Tombouctou et ouvrir l’aéroport de Mopti. Qu’est ce qui les empêcherait d’ouvrir l’aéroport de Kayes ? Moi j’ai été reçu au Quai d’Orsay et ce que j’ai dit, le ministre français des Affaires étrangères ne peut pas le dire.  Nous avons demandé l’ouverture de l’aéroport. Nous n’avons pas été entendus. Le président de la République a fait des promesses pour réhabiliter la route, rien n’a été fait. Il est temps que le gouvernement comprenne que Kayes fait partie du pays et d’ailleurs sans Kayes, il n’y a pas de Mali.

On leur a dit de bloquer la route pour voir quand est ce qu’ils vont commencer les travaux. Le budget est fixé à 352 milliards de Fcfa pour faire la route. On peut trouver des entreprises qui peuvent la faire.

C’est pour vous dire que nous soutenons à 100% le blocage de la route parce qu’on ne peut pas accepter qu’un gouvernement soit aussi irresponsable. Tous les présidents qui se sont succédé à la tête du Mali ont tous été ingrats envers Kayes.

Nous posons la question de savoir ce que Kayes a fait contre le Mali. Nous manifestons notre soutien indéfectible au blocage de la route jusqu’à ce qu’on ait une visibilité sur quand les travaux vont commencer, l’ouverture de l’aéroport,  l’exonération de toutes les taxes aéroportuaires pour que le billet Kayes-Bamako soit à 100 000 FCFA et Kayes-Paris à 300 Euro ou 350 Euro.

Aujourd’hui, quels sont vos rapports avec le département des Maliens de l’Extérieur ?

Pas bon du tout ! Depuis le début, le Ministère des Maliens de l’Extérieur nous a accusés de tous les noms. On nous a accusés d’être des d’imposteurs. Leur objectif était d’isoler le Conseil supérieur de la diaspora malienne. Leur objectif était de m’asphyxier financièrement pour empêcher le Csdm de fonctionner. Le Csdm a posé des actes. Aujourd’hui, le Csdm est invité dans tout ce que l’Etat fait, à savoir la révision constitutionnelle, la révision de loi électorale, la conférence d’entente nationale, le report des élections législatives, entre autres.

Le Csdm fait partie de la Commission pour le dialogue social. Nous avons demandé un dialogue refondateur, nous avons compris que c’est un dialogue politique inclusif. Et le Csdm est apolitique et à but non lucratif. On ne soutient aucun candidat, aucune formation politique, comme stipule la loi sur les associations de 1901.

Etes-vous contre le dialogue politique inclusif ?

Pas du tout ! Nous sommes pour le dialogue politique parce que nous avons demandé au président IBK de sortir sa main tendue pour que qu’elle soit bien visible. On est allé voir le chef de file de l’Opposition, Soumaïla Cissé, pour lui demander d’accepter cette main tendue. C’est à la suite des négociations du Csdm qu’il y a eu le dialogue politique, qu’il y’a eu un gouvernement de mission.

C’est pour vous dire que nous sommes cohérents dans notre approche. Nous intervenons quand il le faut. Personne ne nous demande d’intervenir. Nous sommes des citoyens et nous mettons le Mali au-dessus de tout. Malheureusement, le Mali est devenu aujourd’hui un pays anormal. Il faut des voix qui se lèvent pour dire la vérité.

Le Csdm est-il reconnu par le département de tutelle ?

Nous n’avons pas besoin d’être reconnu par le Ministère des Maliens de l’Extérieur puisque même le nom de ce département est erroné parce qu’il n’y a qu’un seul Malien, mais pas un Malien établi à l’extérieur et celui qui est établi à l’intérieur.

Pour la petite histoire, notre récépissé est délivré par le Ministère de l’Administration territoriale. Ce n’est pas le Département des Maliens de l’Extérieur qui nomme un consul, c’est plutôt le ministère des Affaires étrangères qui le nomme et la Convention de Vienne est différente de la Convention de Genève en ce qui concerne les Ambassadeurs et les Consuls.

Un consul a deux prérogatives : l’intégrité physique de son ressortissant et ses biens. Et là, nous travaillons avec nos Consuls. Nous n’avons pas besoin de ce Ministère des Maliens de l’Extérieur. Au contraire, c’est nous qui aidons le Ministère, pas l’inverse.

Et d’ailleurs, on a vu la dernière fois le Ministre dire sur un plateau télé qu’il travaille avec le Haut conseil des Maliens de l’extérieur (Hcme) et on s’est dit que ce Monsieur ne connait pas ses prérogatives. Si tu connais tes prérogatives, tu ne diras pas que tu travailles avec le Haut conseil des Maliens de l’extérieur.

Quand on parle de l’émanation de l’Etat, d’un peuple, on peut dire qu’il prend les gens comme des idiots. La seule chose qui émane du peuple c’est la Constitution malienne dont l’article 5 donne la liberté à chaque Malien d’appartenir à l’association qu’il veut. Il n’y a aucune loi qui interdit qu’une autre association soit d’utilité publique et ces quatre dernières années nous avons été beaucoup plus utiles à l’Etat malien et à la diaspora malienne que le Haut conseil des Maliens de l’extérieur.

Aujourd’hui, nous n’avons rien contre IBK ou le Rpm, mais Habib Sylla a outrepassé ses prérogatives. Il a violé les Statuts et le Règlement Intérieur du Haut conseil des Maliens de l’extérieur et la loi 1901 car le Hcme est une association à but non lucratif qui est censée regrouper tous les Maliens. Voir le Ministère qui est politique soutenir le Haut conseil des Maliens de l’extérieur, nous ne sommes pas étonnés.

Etes-vous aujourd’hui dans une logique d’engager un combat contre le ministre  Amadou Koïta ?

Ce n’est pas un combat ! Je le dis, un ministre, tu dis ce que tu sais et tu le dis bien ou tu la fermes et tu dégages. Nous n’avons pas manqué de dire à IBK et à son gouvernement qu’ils ont menti quand ils ont déclaré sur l’Ortm qu’Adama Traoré mort en France n’est pas un Malien. Nous n’avons pas manqué de dire à l’ancien ministre Abdrahamane Sylla de dégager. C’est pour vous dire que le ministre est là pour des associations comme le Conseil supérieur de la diaspora malienne et s’il ne fait pas bien son travail on va lui demander de dégager car c’est  nous, Maliens, qui le payons. C’est lui qui a besoin de nous, mais nous, nous n’avons pas besoin de lui.

Quels sont également vos rapports avec le président du Haut conseil des Maliens de l’extérieur (Hcme) Habib Sylla ?

Nos relations avec le Haut conseil des Maliens de l’extérieur ne sont pas bonnes par ce qu’au début, je n’ai rien dit quand le président Habib Sylla m’a accusé d’être un imposteur, un apatride. Il m’a qualifié de charognard. Je n’ai pas répondu. Il a vu finalement qu’on ne peut pas empêcher une association de voir le jour, parce que c’est légal.

Il est important de comprendre qu’on ne peut pas empêcher un Malien d’appartenir à une association. S’il avait été plus intelligent, on aurait pu travailler ensemble. Nous sommes allés jusqu’à leur écrire pour leur demander qu’on puisse créer un cadre de concertation pour les Maliens établis à l’extérieur. Ils ont répondu non.

Quand nous nous sommes retrouvés au Ministère de l’Administration territoriale  dans le cadre de la révision de la loi électorale, le Conseil supérieur de la diaspora malienne a demandé un député  à l’Assemblée nationale pour le compte de la diaspora. Je leur ai dit que le député sera celui du Csdm et celui du Hcme.

Au moment où nous aurons un député, nous pourrons travailler ensemble. Mais nous avons compris que le Hcme ne veut pas qu’on travaille ensemble parce qu’ils sont contrôlés par l’Etat. Et cela pour une raison simple : on vous laisse vos privilèges et vous ne nous dérangez pas. C’est pourquoi vous n’entendez jamais le Haut Conseil des Maliens de l’Extérieur réclamer quelque chose pour les Maliens établis à l’extérieur.

Pour la petite histoire, Habib Sylla n’est même pas malien. C’est un Gabonais à la tête du Haut conseil des Maliens de l’extérieur. Il a renoncé à sa nationalité vers 1998 au Gabon et jusqu’à présent il n’a engagé aucune procédure pour se la faire restituer. L’Etat malien le sait, ils l’ont laissé pour le contrôler.  Quand nous interpellons le ministre des Maliens de l’Extérieur, il sort pour nous traiter de menteurs. Celui pour qui j’ai eu le problème avec le ministre Amadou Koïta est bel et bien présent. Celui qui m’a envoyé les vidéos de sa cellule, quand il a été arrêté en Algérie.

Après le ministre, le Hcme a fait une conférence de presse pour démentir ce que j’ai dit. Voilà comment le torchon a commencé à bruler entre nous.

Une fois de plus, nos relations avec Hcme ne sont pas bonnes, mais nous savons ce que nous devons faire pour défendre les causes des Maliens établis à l’extérieur. Si réellement le Hcme veut travailler pour le bonheur des Maliens établis à l’extérieur, nous pourrions travailler ensemble.

Etes-vous prêts à vous réconcilier aujourd’hui avec Habib Sylla ?

Absolument, je leur ai même tendu la main publiquement devant l’Ortm  et la main est toujours tendue. D’ailleurs, il y a un autre problème. Je ne peux pas travailler avec un Gabonais qui est à la tête d’une association malienne. C’est aussi un problème qu’il faut régler. Mais c’e n’est pas à nous de le faire.

Avez-vous tenté de porter plainte contre Habib Sylla par rapport à sa nationalité ?

Non, ce n’est pas à nous de le faire. Si on le fait, les gens penseront que c’est une affaire personnelle. Ce n’est pas une histoire de personnes. C’est une histoire de fond. Nous avons des procureurs de la République. Comme le Mali est devenu un pays d’impunité où on vole des milliards et où des avions achetés ne fonctionnent pas, des promesses de trains qui n’arrivent jamais. Si Habib était dans un pays normal, il devait être en prison à la demande du président de la République.

Certains Maliens de la diaspora veulent assigner Habib Sylla en justice dans une  affaire foncière, êtes-vous au parfum de cette affaire ?

Bien sûr,  nous avons même les dossiers avec nous. Il s’agit de 700 titres fonciers vendus à des personnalités. Cela fait longtemps qu’ils m’ont contacté, ils pensent que s’ils me parlent de l’assignation de Habib Sylla, je serais content. Mais non, c’est parce que ce n’est pas à nous de nous plaindre contre Habib. Nous, on ne se reconnait pas dans cette association. Ce sont les membres du Haut conseil des Maliens de l’extérieur qui doivent se plaindre.

Je ne suis pas un Procureur. Mais si un Malien lambda porte plainte contre Habib Sylla, nous allons nous constituer en partie civile pour demander réparation des dommages et intérêts que ces gens-là ont subi. Au Conseil supérieur de la diaspora malienne, nous sommes des Maliens tout court. Ces gens-là veulent porter plainte contre Habib Sylla dans un tribunal de Bamako et en France, mais je leur ai dit d’attendre.

Il y a encore plus grave ! Nous avons bénéficié, par rapport à ce que nous avons demandé à l’Etat compte tenu de notre apport à l’économie malienne, des avantages dans le code d’investissement et le retour des immigrés maliens au Mali. Ce sont des milliards de nos francs que le Haut conseil des Maliens de l’extérieur (Hcme) a gagné de façon individuelle à travers de nombreux conteneurs rentrés à Bamako sous prétexte que ce sont des Maliens qui rentraient. C’était tellement énorme que le Premier ministre Boubou Cissé a été obligé de supprimer les avantages. Ça aussi c’est un autre dossier explosif.

Réalisé par El Hadj A.B. HAIDARA

 

Témoignage de Boubacar Samoura, un jeune malien expulsé de l’Algérie :

“Nous avons été expulsés par des gendarmes… ” 

Nous étions à Alger et un soir des gendarmes sont venus taper à notre porte et quand on leur a demandé ce qu’ils voulaient, ils n’ont pas voulu nous donner d’explication. Il nous ont juste dit qu’ils allaient nous ramener chez nous. Quand j’ai demandé à prendre mon sac, ils m’ont dit que ce n’était pas la peine et qu’ils allaient nous ramener dans nos chambres pour qu’on fasse nos affaires. Ainsi, j’ai essayé d’appeler à trois reprises l’Ambassade du Mali en Algérie, en vain. Elle n’a pas répondu. Nous étions très nombreux dans la cellule. J’ai fait des vidéos pour les envoyer aux responsables du Conseil supérieur de la diaspora malienne afin qu’ils nous viennent en aide.

Nous étions dans un premier temps au nombre de 60 personnes et le deuxième jour, ils ont amené d’autres personnes constituées de différentes nationalités notamment des Ghanéens, des Guinéens, des Sénégalais, entre autres. Quand vous arrivez, ils vous fouillent et prennent votre argent et votre téléphone.

C’était le 13 juillet dernier et nous avons quitté Alger le 15 juillet 2019 pour le Niger. Et du Niger, ils nous ont conduits au Burkina Faso.  Nous avons fait plus de 15 jours entre Alger et Niamey. Ils nous apportaient souvent à manger, mais pas assez pour tout le monde. Des gens avaient leur passeport et tout, mais ce n’était pas leur problème.

C’est en 2017 que je suis arrivé à Alger par voie terrestre et je travaillais dans les jardins. Je n’avais aucun problème avec les Algériens eux-mêmes, jusqu’à ce que ces gendarmes viennent nous ramasser un beau jour pour nous expulser. Arrivés à Bamako, ils nous ont placés dans un centre à Niamakoro.

Nous étions 200 Maliens puis 166. Quand nous sommes arrivés à Bamako, le gouvernement nous a enregistrés et nous a demandé ce que nous voulons faire comme travail. Moi je compte toujours repartir à l’étranger, sauf si je trouve un travail digne de ce nom ici au Mali”.

Réalisé par El Hadj A.B. HAIDARA

Source: Aujourdhui-mali