Insécurité : Bamako, nid de bandits

Un manteau de terreur enveloppe Bamako en ce début d’année 2020. Caractérisé par des bandits qui ciblent des commerces lors de braquages dignes du cinéma, qui dépouillent et agressent, parfois même en plein jour. Au moins cinq braquages « osés » à mains armées ont été enregistrés dans la ville en l’espace de quelques semaines. Si les autorités en charge de la sécurité tentent de faire face à cette nouvelle donne et ont déjà réussi à appréhender quelques-uns de ces « gangsters », les craintes ne sont pas dissipées dans la population.

Les temps ont changé, les modus operandi aussi. Les braquages de nuit à domicile ont quelques peu laissés place à des techniques nouvelles. Trois ou quatre jeunes cagoulés, armés de pistolets automatiques, débarquant à moto et opérant de manière clinique. Quelques minutes suffisent pour réaliser un coup qu’ils n’hésitent plus à faire en pleine journée.

Boutiques, agences multiservices (Mobicash, Orange Money, Western Union, Wari, Canal+, etc.), guichets automatiques, supermarchés, entre autres, sont les nouvelles cibles des braqueurs. Des endroits où ils peuvent en un temps record mettre la main sur de l’argent liquide et s’enfuir.

Les attaques se sont multipliées dans le district de Bamako et dans sa périphérie depuis environ trois semaines. Dans la nuit du 22 au 23 janvier, un boutiquier a été attaqué et dépossédé d’une forte somme d’argent près de l’école publique de Kalaban-coura, en Commune V.

Quelques jours plus tard, le 25 janvier, dans le quartier des 1008 logements à ATTbougou, les populations, médusées, assistaient à une série de braquages dirigés contre une boutique et deux cyber-cafés, incluant des multiservices de transfert Orange Money, Mobicash et Canal+.

Selon des témoins de la scène, ils étaient quatre, armés et cagoulés, sur deux motos, à débarquer aux environs de 19 h, tirant trois coups de feu et endommageant au passage les vitres d’un véhicule garé tout près. Au final, divers matériels informatiques et plus d’une dizaine de millions de FCFA auraient été emportés.

Comme si cela ne suffisait pas, et toujours selon le même mode opératoire, un autre braquage a été opéré trois jours après, le 28 janvier, à Sébénicoro, où trois bandits armés ont attaqué vers 21 heures une boutique multiservices et de vente de télévisions à écrans plats, non loin de l’axe principal bitumé, à environ 400 mètres du commissariat de police du 9ème arrondissement. Une importante somme d’argent et une moto Djakarta ont été volées.

Les Bamakois inquiets

Avec ces multiplications des braquages, de jour comme de nuit, beaucoup d’habitants de la capitale, surtout les commerçants, les propriétaires de boutiques et les gérants d’agence multiservices de transfert d’argent et de distribution, craignent pour leur sécurité. Ils sont nombreux à interpeller le gouvernement, notamment le ministère de la Sécurité et de la protection civile pour que des mesures rigoureuses soient prises pour stopper es divers cambriolages.

« Nous ne sommes plus sereins dans nos boutiques, parce qu’à n’importe quel moment des bandits  armés peuvent surgir de nulle part pour nous braquer. Personnellement, je ne laisse plus ma boutique ouverte au-delà de 22h30, alors qu’autrefois je ne fermais qu’à 1h du matin », déplore Ibrahima Cissé, propriétaire d’une boutique à Kalaban-coura.

« Il faudrait que la police et la gendarmerie arrivent très rapidement à contrôler la situation parce que c’est inadmissible que cela continue. En un clin d’œil, ces malfrats nous dépouillent de sommes importantes et c’est tout notre commerce qui s’écroule. Ces bandits doivent croupir en prison », ajoute Cissé, visiblement très remonté.

Pour Harouna Sangaré, gérant d’un kiosque Orange money à Niaréla, qui dit craindre chaque jour un braquage de son poste mais s’en remet à Dieu pour sa protection, ce qui se passe actuellement dans la ville est très préoccupant.

« Déjà, nous avons remarqué que les patrouilles se sont intensifiées la nuit, mais il faudrait également penser à des mesures strictes au cours de la journée, parce que les malfrats n’opèrent pas que la nuit », déclare-t-il.

Dispositif renforcé

Aussitôt après les premiers  braquages, le ministère de la Sécurité et de la protection civile s’est penché sur la situation et a donné aux forces de défense et de sécurité  des instructions fermes de renforcement du dispositif sécuritaire sur Bamako et ses environs.

Le 22 janvier 2020, le Directeur général de la police nationale, l’inspecteur général Moussa Ag Infahi, a rencontré les commissaires des arrondissements de Bamako, Moribabougou, Kalaban-coro et Kati et les commandants des brigades spéciales d’intervention.

Après avoir condamné les cas de braquage commis dans la capitale et dans sa périphérie, le premier responsable de la police nationale a invité les différents chefs à être sur le terrain afin de bien coordonner les missions avec leurs éléments.

« Il nous été demandé de sortir à des heures propices aux attaques, de faire un maillage sur Bamako et sa périphérie, de mettre la pression sur la vérification des motos et de multiplier les check points pour faire ralentir les gens, parce qu’en cas de braquage dans un secteur de la ville,  s’il n’y a pas de barrage de police, les braqueurs s’échappent plus facilement », explique le Directeur régional de la police nationale du District de Bamako, le contrôleur général Siaka Bouran Sidibé.

« Nous avons renforcé nos effectifs et  nous les avons dotés des moyens adéquats pour sillonner toute la ville, de jour comme de nuit,  sans relâche, et pour être prompts dans leurs interventions. Les contrôles d’identités et les fouilles des véhicules ont été aussi intensifiés », souligne-t-il.

Une  vaste opération de ratissage, conduite par la gendarmerie nationale, avec à sa tête le lieutenant-colonel Alpha Yaya Sangaré, a également été entamée depuis quelques jours à Bamako et environs pour mieux sécuriser la capitale et ses alentours. Cette opération, dans laquelle sont engagées différentes unités de la gendarmerie, a pour principal objectif de diminuer considérablement les risques d’insécurité et de rassurer les populations.

Premiers résultats

« La situation actuelle à Bamako est critique et  je veux des résultats. L’insécurité est en train de gagner du terrain et cela est inadmissible », déclarait en substance le Directeur général de la police nationale lors de la réunion du 22 janvier.

Des résultats, il y en a eu beaucoup par la suite, à en croire, le Directeur régional de la police nationale du district de Bamako, le contrôleur général Siaka Bouran Sidibé.

« Nous avons interpellé deux braqueurs qui ont récemment participé au braquage d’un car à Bougouni, où un policier a trouvé la mort. À Bamako, au niveau des 6ème, 7ème et 12ème arrondissements, nous avons interpellé des braqueurs en possession d’armes », affirme-t-il.

« Deux des braqueurs de Sébénicoro ont été également arrêtés et nous avons saisi des motos, des sommes d’argent, des clés USB, beaucoup de téléphones, des munitions de pistolets mitrailleurs et automatiques, des pieds de biche, des marteaux, etc. », poursuit M. Sidibé.

À l’en croire, les enquêtes se poursuivent pour interpeller les éventuels complices de ces malfrats et, ceux qui sont arrêtés,  et sont d’ailleurs tous des repris de justice déjà répertoriés dans les archives de la police, sont traités comme des suspects, mêmes s’ils reconnaissent les faits, et seront déférés et mis à la disposition du Parquet pour être jugés.

Si nous en sommes là aujourd’hui, est-ce à dire que les opérations « coup de poing » menées il y a presque exactement un an dans la capitale, et qui avaient permis d’appréhender plusieurs suspects, ont montré leurs limites ?

« Non », répond le contrôleur général Sidibé, pour lequel, à l’époque « il y avait beaucoup plus de braquages sanglants à domicile et qu’on parlait de véritables nids criminogènes, ce qui n’est plus trop le cas aujourd’hui, avec des bandits qui sont plutôt dissimulés dans la population ».

« Certes, il ne peut pas y avoir zéro risque de braquage, mais la situation est sous contrôle », assure-t-il.

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