Certains se frottent les mains parce qu’ils arrivent à bien écouler des articles. D’autres décrient une mévente qui peut s’expliquer, selon eux, par le contexte de la pandémie du coronavirus et une récession économique

 

La fête de l’Aïd el-fitr ou «petite fête» en opposition à la fête de l’Aïd el-kebir (Tabaski) qui marque la fin du mois de ramadan se profile à l’horizon. Même dans un contexte de Covid-19, nos compatriotes affichent un goût prononcé pour cette fête, l’une des plus importantes de la communauté musulmane, où tous, notamment les femmes et les enfants, veulent s’habiller de neuf, se faire beau ou belle.

Il suffit d’y faire un tour au Grand marché de Bamakopour apprécier l’atmosphère de kermesse qui y prévaut depuis plus d’une semaine. Les lieux grouillent de monde. Vendeurs et clients marchandent. Les premiers proposent vêtements, chaussures et autres articles divers à des prix, selon eux, défiant toute concurrence. Les seconds veulent qu’ils tiennent compte du contexte du moment, marqué par la pandémie du coronavirus et la conjoncture économique.

Les voies qui desservent le marché sont embouteillées à longueur de journée. La foule est compacte dans le marché. Les clients peinent à se frayer le chemin puisque mêmeles allées sont occupées par des vendeurs. Des ordures jonchent le sol ici et là et on sent le grand brouillamini dans cette course contre le temps. Tout le monde veut écouler ses articles. Tout le monde veut vite faire ses courses et revenir à la maison.

Un constat, les mesures barrières sont foulées aux pieds. Parmi les vendeurs et les clients, ceux qui portent les masques se compte sur les doigts d’une main à l’échelle du Grand marché de Bamako. Les kits de lavage des mains au savon brillent par leur absence et le respect de la distanciation physique n’est pas non plus à l’ordre du jour. Nos compatriotes continuent-ils d’être dans le déni de la pandémie ? En tout cas, on est en droit de se préoccuper des éventuelles conséquences de ce méli-mélo. Le marché s’ouvre très tôt. Certains attirent les clients au son de tam-tam, au rythme de pas de danse et de criée. Pour autant, ils ne sont pas nombreux à se satisfaire du comportement du marché.

ATTIRER LA CLIENTÈLE-Au «rail da», de multiples articles sont exposés. On en trouve basins, chaussures, robes, sacs, montres et autres accessoires pour tout âge et pour les deux sexes. Les commerçants pensent profiter de la situation pour se faire des bénéfices. Par endroits, on constate des frictions entre clients sous le coup de l’énervement (le jeûne y est peut-être pour quelque chose) ou des bousculades.Du matin au petit soir, le marché reste très animé.

Ibrahim Maïga, joueur de tam-tam, explique que cet instrument lui permet d’attirer la clientèle. Pour lui, cette animation est devenuede la routine même s’il reconnaît qu’elle est aussi très éprouvante, en termes de débauche d’énergie. Il confirme aussi que la technique est payante puisqu’il se frotte bien les mains.

Les lieux abritent aussi des ateliers de couture, des salons de coiffure, des magasins de prêts à porter. Kia Touré, propriétaire d’une boutique de vente d’habillements et autres accessoires, explique que le marché est timide parce que les clients ne se bousculent pas aux portillons de sa boutique comme pendant les autres années. à quelques encablures des lieux, une tresseuse du nom d’Oumou Cissé explique aussi que les temps sont durs. Elle non plus n’accueille pas beaucoup de clientes. Elle justifie cela par le fait que la gent féminine raffole maintenant de perruques.

Fatoumata Koné, femme au foyer, parle de l’importance de la fête pour la femme. «Je serais très heureuse de me rendre belle avec une coiffure à la mode ». Pour elle, les femmes se soucient peu de la Covid-19. Aminata Coulibaly, également ménagère, estime n’avoir pas d’argent à consacrer à la tresse pour la fête. Pour elle, il est clair que la satisfaction des besoins de sa progéniture reste la priorité.

Adja Diakité est vendeuse de chaussures. Elle s’inquiète aussi de la mévente surtout qu’elle aussi doit acheter des vêtements pour ses enfants. «En tant que mères de famille, nous avons les mêmes soucis que les hommes.

C’est vrai que ces derniers prennent en charge la famille mais nous aussi occupons une place essentielle dans le foyer», témoigne-t-elle. Quant à Oumar Sidibé, il peste contre la flambée des prix. «C’est forcément des dépenses qui s’annoncent». à cet effet, il souhaite que ceux qui n’ont pas les moyens de faire autrement ne se compliquent pas davantage la vie.

Au niveau de certains ateliers decouture improvisés, tout porte à croire que les coupures intempestives d’électricité ont impacté le travail des couturiers et les rendez-vous donnés aux clients. Oumar Koné témoigne : «Depuis le début du ramadan, notre atelier a reçu assez de commandes mais avec les coupures récurrentesjour et nuit, nous n’avons pas pu honorer tous nos engagements à temps».

Or, chacun veut récupérer ses vêtements (Basin, Wax et autres tissus légers) avant la fête. Un couturier reproche aux clients de ne pas amener tôt les tissus à coudre et d’attendre la dernière minute pour cela. Or, quand le couturier travaille sous pression, il y a de fortes chances que le client ne soit pas satisfait.

Les enfants sont les premiers concernés par la fête.Les petites filles adorent les parures «Kononi » à porter surles tresses. Une vendeuse de perle souligne qu’au-delà de la fête, les enfants continueront à porter les perles.

Aminata DIARRA

Source : L’ESSOR